Auteur : Annette Sell

Günter ALEXANDER, Das Wesen der Begriffe. Eine Studie zu G.W.F. Hegels „Wissenschaft der Logik“, Baden-Baden, Tectum Verlag, 2018, 258 p.

L’auteur décrit dans la préface son livre comme le résultat de sa tentative pour comprendre la logique de Hegel. Sa démarche est fort surprenante. L’introduction, qu’il nomme la « logique de la logique », consiste en réflexions métathéoriques sur la pensée humaine, laquelle est pour lui avant tout un agir dans un contexte donné. Ainsi, il ne cesse de parler de l’homme comme d’un « acteur » et cherche à le décrire dans son environnement. C’est dans ce cadre qu’il passe en revue la Science de la logique et en traduit les différentes sections dans son langage propre. Lorsqu’il analyse le début de la logique, il détermine l’être comme « une impression d’ensemble qui se présente à un acteur une fois qu’il a, d’un geste, laissé l’initiative à son environnement autonome pour un moment » (27). Cette présentation du début donne un exemple de l’approche choisie… L’acteur reconnaît ensuite qu’il ne peut pas commenter l’être avec un geste. Il sollicite la répétition de l’impression, mais cela ne lui est pas accordé. De ce fait, il fait face à un néant. Il assiste alors au processus du devenir : « L’hypothèse du devenir ne se réfère qu’à la période de temps pendant laquelle deux impressions globales de son environnement se sont présentées à l’acteur. » (28) Avec cette analyse, rien n’est gagné pour comprendre le début de la Logique, et par l’inclusion de la temporalité dans la relation de l’être, du néant et du devenir, on interprète incorrectement le commencement systématique de la logique. Tous les chapitres et toutes les thèses de la Logique sont ainsi traduits dans l’horizon de compréhension de l’auteur. Mais cette traduction, loin de faciliter la lecture de l’ouvrage de Hegel, est génératrice de confusions quant à ses intentions. L’auteur conclut son parcours par trois chapitres sur les « fondements de l’éthique », des « spéculations cosmologiques » et « le conte de l’argent » dont on n’identifie pas le lien avec la logique hégélienne. L’ouvrage présente une vision impénétrable de la pensée et du monde, très éloignée de la Logique hégélienne. Aussi ce livre demeure un parcours solitaire et peu compréhensible de la Science de la logique.

Annette SELL (Hegel-Archiv) (trad. G.M.)

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Pour citer cet article : Annette SELL, « Günter ALEXANDER, Das Wesen der Begriffe. Eine Studie zu G.W.F. Hegels „Wissenschaft der Logik“, Baden-Baden, Tectum Verlag, 2018 », in Bulletin de littérature hégélienne XXIX, Archives de Philosophie, tome 82/4, Octobre-décembre 2019, p. 815-852.

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Wolfgang NEUSER & Steffen LANGE (Hrsg.), Natur zwischen Logik und Geschichte. Beiträge zu Hegels Naturphilosophie, Würzburg, Königshausen & Neumann, 2016, 276 p.

Quand il est question de la nature dans la philosophie de Hegel et quand il s’agit de déterminer le lieu de la nature dans le système hégélien, la préposition « entre » s’impose immédiatement. La nature se trouve en effet « entre » la logique et ce qu’on appelle la philosophie de l’esprit. Dans le présent ouvrage, la nature est située « entre » la logique et l’histoire, l’histoire étant à comprendre avant tout dans le sens de positions théoriques relevant de la philosophie de l’histoire, de la philosophie de la nature et de la science. Treize spécialistes de Hegel, hommes et femmes, se confrontent à l’exigence de penser cet entre-deux à partir des centres de gravité de leurs recherches respectives. R. Wahsner se consacre au thème de la nature, qui chez Hegel apparaît dans sa globalité comme un organisme vivant. À ce sujet, elle problématise le rapport de la philosophie de la nature de Hegel et des sciences de la nature. W. Lenski considère la nature sous l’aspect de la nécessité et de la contingence et montre les différences entre les versions logiques et les versions naturelles de ces concepts. Il s’agit aussi de logique dans l’intervention de K.J. Schmidt, qui se concentre sur la pensée de la logique comme forme absolue. D. Wandschneider se saisit, une nouvelle fois, du thème difficile et multiplement discuté de l’extériorisation de l’Idée comme nature à la fin de la Science de la logique. La logique est également le point de départ de la contribution de P. Stekeler-Weithofer, qui présente de manière claire et intelligible le concept hégélien de nature. Il montre que la nature, chez Hegel, est toujours l’Idée de la nature, Hegel déclarant que « la nature comme Idée ou comme réalisation complète des processus de l’être se produit comme l’objet d’un savoir générique » (88). E. Barbagallo dirige son attention sur la temporalité et l’historicité dans la pensée hégélienne. L’essai de Lu de Vos porte à nouveau sur la logique, qui présente le concept et l’Idée de la nature dans leur signification spéculative. Dans un panorama d’histoire de la philosophie, W. Neuser expose le concept de nature depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque moderne. Le texte de M. Wetzel est une comparaison des approches de Dieter Wandschneider et de Carl Friedrich von Weizsäcker. S. Achella montre l’unité systématique de la pensée et de la vie. Quand P. Heuer se confronte avec la thèse de Wofgang Neuser sur le « détachement du savoir du sujet » dans la société scientifique, il reprend une discussion actuelle. S. Lange propose quant à lui un rapprochement historico-philosophique de Schelling et Oken, ce qui aboutit à une nouvelle théorie de l’organisme. D. von Engelhardt fournit un aperçu intéressant et érudit sur la « folie » de Hölderlin et la met en relation avec la théorie hégélienne de la nature et de l’esprit. Dans la mesure où l’ouvrage fut élaboré dans le contexte d’une session du « cercle international d’étude de la philosophie de la nature de Hegel », il se conclut par un bilan dressé par W. Neuser des trente années de travail de cette association.

L’ouvrage forme un pot-pourri d’orientations dans la recherche. Il est à cet égard un reflet de la philosophie hégélienne elle-même qui, par la multiplicité des prolongements qu’elle autorise, joue aussi un rôle important dans le discours philosophique contemporain.

Annette SELL (Hegel-Archiv, Bochum) (trad. G. M.)

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Pour citer cet article : Annette SELL, « Wolfgang NEUSER & Steffen LANGE (Hrsg.), Natur zwischen Logik und Geschichte. Beiträge zu Hegels Naturphilosophie, Würzburg, Königshausen & Neumann, 2016 » in Bulletin de littérature hégélienne XXVII, Archives de Philosophie, tome 80/4, Octobre-décembre 2017, p. 773-802.