Bulletin cartésien XLIII (2012)

Bibliographie internationale critique des études cartésiennes pour l’année 2012

LIMINAIRES

I.- 2002-2013 : Une décennie d’édition de La Recherche de la vérité par la lumière naturelle par Siegrid AGOSTINI

1. Textes et documents

1.1. DESCARTES

1.1.1. DESCARTES, « 1642 nen 1 gatsu 24 kka, Regius kara Descartes ni aterareta shokan [Lettre de Regius à Descartes, le 24 janvier 1642] », trad. en japonais par MOCHIDA, Tatsuro, Journal of Nagoya Gakuin University. Humanities and natural sciences, 48(2), 2012, p. 125-130 [en japonais].

1.1.2. DESCARTES, « Descartes kara boushi he no shokan (1641 nen 8 gatsu) yakukai [Une lettre de Descartes à X, août 1641] », trad. en japonais par YAMADA, Hiroaki, Journal of Nagoya Bunri University, 12, 2012, p. 57-66 [en japonais].

1.1.3. DESCARTES, Abrégé de musique, éd., trad., présentation et notes de DE BUZON Frédéric, Paris, Puf, 2012, 160 p., 2e éd.

1.1.4. DESCARTES, René, As paixões da alma, trad. de MIORANZA, Ciro, São Paulo, LaFonte, 2012. 152 p.

1.1.5. DESCARTES, René, ДЕКАРТ (Рене), Метафизичке медитације о првој филозофији : у којима је доказано да Бог постоји и да се човекова душа стварно разликује од тела, приговори које су веома учене особе изнеле против претходних медитација и одговори аутора [Meditationes de prima philosophia…], traduit en serbe par Иван ВУКОВИЋ [VUKOVIĆ, Ivan], Нови Сад [Novi Sad], Сајнос, 2012, 269 p.

1.1.6. DESCARTES, René, ДЕКАРТ (Рене), Принципи на филозофијата: избор [Principes de la philosophie. Extraits], traduit en macédonien par Николче СТОЈАНОВСКИ [STOJ ANOVSKI, Nikolche], Скопје Ѓурѓа, 2012, 95 р.

1.1.7. DESCARTES, René, ДЕКАРТ (Рене), Человек [L’Homme], traduit en russe par. Б.М. СКУРАТОВ [B.M. SKURATOV], Москва Праксис, 2012, 190 p.

1.1.8. SWEIS, Khaldoun A., & MEISTER Chad V., Christian Apologetics. An Anthology of Primary Sources, Grand Rapids, Michigan, Zondervan, 2012, 553 p. (Anthologie commentée : Chap. 16 – « The Wager : Blaise Pascal », p. 168-170 ; chap. 41 : « The Cogito : René Descartes », p. 389-393).

1.2. CARTESIENS

1.2.1. BECKETT, Samuel & GEULINCX, Arnold, Notes de Beckett sur Geulincx, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2012, 272 p.

Cet ouvrage, dirigé et préfacé par N. Doutey, présente une traduction en français par H. Bah-Ostrowiecki des notes que Beckett a prises en 1936 à partir de l’œuvre latine de Geulincx. Cette traduction est suivie de cinq articles dont les quatre premiers sont des traductions en français d’articles initialement publiés en anglais et consacrés au rapport que l’œuvre de Beckett entretient avec celle du philosophe flamand. Le cinquième article offre une étude inédite de Th. Dommange centrée sur Geulincx lui-même, mais qui donne une justification philosophique tout à fait convaincante de la formule qu’avait employée Beckett à propos des conceptions occasionalistes de ce cartésien néerlandais, à savoir un « fascinating guignol world ». Précisons que, dans ces « notes » de Beckett sur Geulincx, on ne trouvera pas de commentaires ni de réflexions personnelles de l’écrivain sur la philosophie de Geulincx, mais seulement les passages de l’œuvre de Geulincx que Beckett a retranscrits et qui constituent, pour ainsi dire, une anthologie beckettienne de Geulincx. Elles présentent donc un intérêt certain pour les spécialistes de l’écrivain irlandais : l’occasionalisme radical de Geulincx offre à Beckett une image de l’impuissance humaine qui se révèle fructueuse pour la constitution de son œuvre littéraire. Le principe premier de l’éthique de Geulincx résonne alors de manière particulière : « Ubi nihil vales, ibi nihil velis. [Là où tu n’as aucun pouvoir, garde-toi aussi de vouloir.] » (p. 54). L’éthique de Geulincx prône un dédain de soi et une certaine forme de détachement du monde qui, sans leur fondement théologique que Beckett n’assume pas, donnent sa dimension spécifique à la condition humaine telle qu’elle est exprimée chez Beckett. Pour les études cartésiennes, l’apport de ces notes est évidemment plus limité puisque l’on disposait déjà d’une traduction en français de l’Éthique par H. Bah-Ostrowiecki (A. Geulincx, Éthique, Turnhout, 2009) et d’une traduction en anglais de ce même ouvrage ainsi que des notes de Beckett s’y rapportant par M. Wilson (A. Geulincx, Ethics, Leyde, 2006). L’ouvrage présente néanmoins l’intérêt de proposer la première traduction française de passages des Quaestiones quodlibeticae et de la Metaphysica vera de Geulincx pris en notes par Beckett (même si ces passages sont bien plus courts que ceux extraits de l’Éthique). L’édition est soignée, usant de codes typographiques permettant de mettre en évidence les modifications minimes (qui n’ont d’ailleurs généralement pas de portée interprétative significative) que Beckett a introduites dans sa transcription par rapport à l’édition Land des Opera philosophica de Geulincx (La Haye, 1891-1893).

Delphine Bellis

1.2.2. CHANDOUX, Nicolas de Villiers, sieur de, Lettres sur l’or potable suivies du traité De la connaissance des vrais principes de la nature et des mélanges et de fragments d’un Commentaire sur l’Amphithéâtre de la sapience éternelle de Khunrath, textes édités et présentés par Sylvain Matton avec des études de Xavier Kieft et Simone Mazauric, préface de Vincent Carraud, Paris-Milan, SÉHA-Archè, « Anecdota », 9, 2012, 576 p.

1.2.3. CHÉDOZEAU, Bernard, Le Nouveau Testament autour de Port-Royal : traductions, commentaires et études (1697-fin du XVIIIe siècle), Paris, Champion, 337 p.

1.2.4. FÉNELON, Fénelon ou le génie méconnu, anthologie introduite par L. Devillairs, Paris, Pocket, 2012, 126 p.

Dans une collection de vulgarisation, ces deux minces volumes proposent des recueils de textes des deux auteurs. Construite avec rigueur et intelligence, la petite anthologie de L. Susini prend appui sur le Mémorial pour proposer divers trajets à travers les textes de Pascal (et non seulement les Pensées). Centrée sur la spiritualité fénelonienne, l’anthologie de L. Devillairs se signale par la densité de ses introductions, la longueur des extraits proposés et le caractère presque militant de son projet (« Il faut lire Fénelon ») ; mention spéciale pour la Bibliographie sélective, riche et pertinente (p. 123-127). Une recension commune à ces deux volumes s’imposait, s’il est vrai, comme l’écrit L. Devillairs, que Fénelon « est l’anti-Pascal par excellence ».

Dan Arbib

1.2.5. PASCAL, Blaise, Das Herz hat seine Gründe, die der Verstand nicht kennt: Schöne Gedanken, anthologie traduite et introduite par KERN, Bruno, Wiesbaden, Marix Verlag, 192 p.

1.2.6. PASCAL, Blaise, Spiritualité, choix de textes présentés par Laurent Susini, Paris, Pocket, 2012, 128 p.

Dans une collection de vulgarisation, ces deux minces volumes proposent des recueils de textes des deux auteurs. Construite avec rigueur et intelligence, la petite anthologie de L. Susini prend appui sur le Mémorial pour proposer divers trajets à travers les textes de Pascal (et non seulement les Pensées). Centrée sur la spiritualité fénelonienne, l’anthologie de L. Devillairs se signale par la densité de ses introductions, la longueur des extraits proposés et le caractère presque militant de son projet (« Il faut lire Fénelon ») ; mention spéciale pour la Bibliographie sélective, riche et pertinente (p. 123-127). Une recension commune à ces deux volumes s’imposait, s’il est vrai, comme l’écrit L. Devillairs, que Fénelon « est l’anti-Pascal par excellence ».

Dan Arbib

1.2.7. Port-Royal, Une anthologie présentée par Laurence Plazenet, Paris, Flammarion, 2012, 1328 p.

1.2.8. WOLZOGEN, Johannes Ludwig, Annotationes in Meditationes Metaphysicas Renati Des Cartis (a cura di Elisa ANGELINI), Rome, Edizioni di Storia e Letteratura, coll. « Temi e Testi », 104, 2012, lxxx-43 p.

Les Annotationes de Wolzogen ne sont pas inconnues, mais elles sont peu lues et peu prises en compte alors qu’elles constituent non seulement un témoignage original et précis sur la réception du cartésianisme au XVIIe siècle, mais aussi une lecture suggestive des Meditationes : on y trouve notamment une discussion relative à la distinction de l’âme et du corps qui n’a rien à envier aux plus scrupuleuses des études actuelles. Cette belle édition comprend les variantes du texte et est accompagnée d’une introduction généreuse et érudite qui situe le cadre historique et culturel de cette adaptation socinienne de D. Toutes choses qu’une consultation en ligne d’une édition des Annotationes ne saurait nous offrir et qui montre bien qu’un bon travail de réédition des textes classiques est utile et toujours attendu.

Xavier Kieft

1.3. BIOGRAPHIES

1.3.1. BAILLET, Adrien, La vie de monsieur Descartes, suivi de Abrégé de la vie de M. Descartes, éd. de Bernard de La Monnoye, Paris, Malassis, 2012, 1072 p.

Réédition commode de la biographie classique de D., à l’orthographe modernisée, avec restitution de la pagination de l’édition originale en deux volumes de 1691 et une mise en forme élégante et plus lisible que les différents reprints dont elle avait pu faire l’objet jusqu’à présent. Elle est suivie d’une courte vie de Baillet par son contemporain Bernard de la Monnoye, assez peu favorable à un auteur pourtant ici bien mis en valeur.

Xavier Kieft

1.3.2. CORDAY, Peter, François Fénelon, A biography, Massachusettes, Paraclete Press, 2012, 255 p.

1.3.3. LEROUX, Henri, Claude Picot (janvier 1614-6 novembre 1668). Correspondant et ami mal connu de Descartes, Paris, les éditions Beaurepaire, 2012, 335 p.

Le constat initial est incontestable : celui qu’avec trop de facilité on appelle communément « l’abbé Picot », ce correspondant de D. et traducteur supposé (mais sans doute pas unique) de ses Principia philosophiae en français, est très mal connu. Grâce à un travail d’une savante minutie mais aux hypothèses toujours prudentes, cette biographie apporte un certain nombre de précisions et rétablit des vérités. Ainsi l’A. rend-il à Claude Picot sa véritable date de naissance (janvier 1614, soit bien plus tard qu’on a pu le penser), et s’efforce-t-il de cerner au plus près « une vie quelque peu paradoxale, souvent mentionnée mais largement ignorée des historiens de la philosophie » (p. 226). Plusieurs zones d’ombre demeurent cependant s’agissant d’un homme qui s’est présenté comme avocat (sans qu’on sache s’il en avait la licence) mais n’eut jamais besoin d’exercer pour vivre, et qui ne porta qu’à partir de 1655 le titre d’abbé de Fontaines, alors qu’en toute rigueur il était prieur commendataire de Saint-Jouin-de-Marnes, dont le véritable abbé était François Servien, évêque et comte de Bayeux. Faisant la synthèse de tous les documents susceptibles d’apporter quelque information sur le personnage, cette étude dresse le portrait d’un jeune homme fragile et admiratif, qui fut d’abord (1640-1641) sous l’influence du libertin Des Barreaux (on ignore jusqu’à quel point il le suivit dans ses débauches) avant de se lier avec D., mais sans rédiger lui-même d’ouvrage, à la différence des « petits cartésiens » Clerselier, Cordemoy, La Forge ou Rohault, probablement parce qu’il n’en avait ni la volonté philosophique ni les compétences scientifiques. Au fil des pages, dont l’A. reconnaît modestement qu’elles « n’ont guère en elles-mêmes d’intérêt philosophique » (p. 14) et qui s’attachent parfois à retranscrire quelques documents d’archives (par exemple la copie de l’acte d’inhumation de Claude Picot à Limeil, le 8 novembre 1668) et présentent une riche bibliographie, c’est avec un réel plaisir qu’on se familiarise davantage avec la vie sans œuvre de celui que D. appelle souvent avec respect « Monsieur Picot ».

Frédéric Manzini

1.3.4. RACINE, Jean, Abrégé de l’histoire de Port-Royal, éd. établie, présentée et annotée par Jean Lesaulnier, préf. de Philippe Sellier, Paris, Champion, 2012, 454 p.

2. Études générales

2.1. DESCARTES

2.1.1. ALEXANDRESCU, Vlad (éd), Shaping the Republic of Letters. Communication, Correspondence and Networks in Early Modern Europe, Journal of Early Modern Studies, Vol. 1, Zeta Books, 2012, 210 p.

Cette première livraison d’une nouvelle revue philosophique en anglais et français est consacrée au rôle de la correspondance dans la construction des réseaux savants en Europe à l’âge classique. Dans ce cadre, trois contributions examinent des lettres de D. selon une perspective externe, c’est-à-dire du point de vue matériel de leur diffusion, du point de vue de leur usage stratégique dans la défense de la philosophie moderne en voie de constitution, et du point de vue littéraire de l’image qu’elles donnent de l’acte d’écrire de la philosophie au XVIIe siècle. Tout d’abord, R. Ariew (« Descartes’ Correspondence before Clerselier : Du Roure’s La Philosophie », p. 43-64) montre que dans son ouvrage de 1654 Du Roure paraphrase trois lettres non publiées de D. et éditées seulement à partir de 1656 par Clerselier : la lettre à Clerselier de juin ou juillet 1646 sur la notion de principe, la lettre à Elisabeth du 4 août 1645 sur le bonheur, la lettre à Mersenne du 27 mai 1641 ou à Mesland du 9 février 1645 sur la liberté d’indifférence. Certains points de doctrine du philosophe sont donc vite connus, même s’ils ne sont pas énoncés dans ses textes. Ensuite, A. A. Davenport (« English Recusant Networks and the Early Defense of Cartesian Philosophy », p. 65-86) étudie la manière dont le franciscain anglais Franciscus a Sancta Clara défend la compatibilité de la philosophie mécanique avec les vérités établies de la religion catholique, en paraphrasant dans son Systema Fidei un passage des Réponses aux Quatrièmes Objections sur la transsubstantiation. Enfin, M. Deckard (« Acts of admiration : Wondrous Women in Early Modern Philosophy », p. 87-108) fait l’hypothèse que l’acte d’admiration pour l’intelligence d’Elisabeth qu’est la rédaction des Passions de l’âme oblige l’interprète à prendre en compte le rôle des passions dans l’élaboration d’une philosophie et dans la compréhension de l’histoire de la philosophie en général. – Ces articles, par leur intérêt pour la réception de la correspondance cartésienne, complètent de récents travaux l’ayant abordée de manière interne et montré qu’elle doit être prise comme une source d’informations, moins sur l’individu D. que sur sa doctrine en voie de constitution : La biografia intellettuale di René Descartes attraverso la Correspondance. Atti del Convegno Descartes et l’“Europe Savante”, Perugia, 7-10 octobre 1996, sous la direction de J.-R. Armogathe, G. Belgioioso et C. Vinti, (Naples, 1999), et DesCartes et DesLettres, ‘Epistolari’ e filosofia in Descartes et nei cartesiani, édité par F. Marrone (Florence, 2008 ; BC XXXIX, 3.1.84).

Élodie Cassan

2.1.2. ALEXANDRESCU, Vlad, Croisées de la Modernité. Hypostases de l’esprit et de l’individu au XVIIe siècle, Zeta Books, 2012, 560 p. ; notamment, les chap. 5 « Problèmes de l’union. Et si quelqu’un avait soufflé son jeu à la Princesse Elisabeth ? », p. 124-153 ; chap. 6 : « Problèmes de l’union. Les doutes de Henricus Regius », p. 155-187 ; chap. 8, « Un prolongement de Descartes dans la linguistique moderne », p. 202-250.

2.1.3. ARIEW, Roger, « Descartes’ Correspondence before Clerselier : Du Roure’s La Philosophie », Journal of Early Modern Studies, 2012, 1, 2, p. 43-64.

2.1.4. ATIS, Naciye, « Wisdom in Descartes’ Philosophy », FLSF: Felsefe ve Sosyal Bilimler Dergisi (Journal of Philosophy and Social Sciences), 2012, 14, p. 121-133 [en turc].

2.1.5. BATTISTI, César Augusto, « A doutrina da causalidade e o método de análise em Descartes, in XVII », in Simpósio de Filosofia Moderna e Contemporânea da Unioeste, Tolède, Livro de textos completos do XVII Simpósio de Filosofia Moderna e Contemporânea, 2012/1, p. 39-45 [en portugais].

2.1.6. BELGIOIOSO, Giulia, « Descartes : dalla ‘scienze certa’ alla ‘certezza della scienza’ », in GILBERT, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

2.1.7. BENAVIDES, Cristian Eduardo, « El despliegue de al libertad en el pensamiento moderno : del ‘cogito’ cartesiano al ‘trascendental’ kantiano en la interpretación de Cornelio Fabro », Revista de Filosofia, 2012, 44, 132, p. 105-125 [en espagnol].

2.1.8. BORGES, Marcos Alexandre, « O papel do movimento no Mundo de Descartes », Prometeus. Filosofia em Revista, 5, 10, 2012, 125-140.

2.1.9. BRAIDER, Christopher, The Matter of Mind. Reason and Experience in the Age of Descartes, Toronto, University of Toronto Press, 2012, 340 p.

2.1.10. CHRISTOFIDOU, Andrea, Self, Reason, and Freedom. A New Light on Descartes’ Metaphysics, Londres/New York, Routledge, 2012, 269 p.

L’ouvrage se présente comme une lecture systématique de la métaphysique de D. à partir de ce que l’A. nomme sa conception du moi comme sujet à la fois rationnel et libre. Défendant « l’autonomie de la liberté » comme réquisit initial du projet métaphysique (première thèse), l’A. soutient que cette liberté ne se dissocie pas de « l’autorité de la raison » (seconde thèse), raison dont l’objet n’est pas la certitude mais la vérité (troisième thèse). Selon l’A., D. défendrait une thèse réaliste au sens de Dummett, à savoir que la vérité est indépendante des conditions de vérification des énoncés ou des jugements (p. 145 et 185). Si, par sa première thèse, l’ouvrage peut évoquer Alquié, la seconde exclut toute interprétation tragique ou volontariste de D., et la troisième interdit les interprétations cohérentistes ou pragmatistes du projet cartésien. Or selon l’A., ces trois thèses sont liées par une relation interne entre la nature du moi, la raison et l’assentiment spontané de la volonté au vrai comme au bien (p. 99 et 166-167).

Moins exégèse historique que réflexion philosophique ambitieuse, cette approche se révèle finalement quelque peu décevante dans sa mise en œuvre. D’abord pour des raisons de corpus : la table des matières coïncide pratiquement avec l’ordre des Méditations ; les Principes et les autres textes de métaphysique sont relégués au second plan. En ce sens, il s’agit là d’un énième commentaire des Méditations, comprenant en outre d’importantes disparités entre des chapitres assez scolaires (cf. les pages consacrées aux preuves de l’existence de Dieu ou à la distinction réelle) et d’autres dans lesquels l’A. discute de près des interprétations précises de certaines thèses, notamment les chap. 6 et 7 (sur le problème de l’erreur et de la liberté) ou le chap. 1 (sur le projet cartésien de validation de la raison). L’ouvrage pèche de plus par sa bibliographie (références aux travaux en langue anglaise exclusivement, importantes lacunes, etc.). Enfin, quoique assumé, le choix d’écarter le point de vue historique et toute discussion sur la nature de la science cartésienne suscite des manques qui compromettent l’ambition d’apporter un regard neuf sur la métaphysique de D. Arrêtons-nous par exemple sur la discussion du problème de l’erreur et de la liberté : (1) Au chap. 6, l’A. conclut à partir de la Méditation IV que la faillibilité est le prix de l’autonomie et la rationalité (p. 139) : c’est là une simplification abusive, qui ne tient nul compte des deux moyens par lesquels Dieu aurait pu préserver notre liberté sans nous exposer à l’erreur (nous donner des idées claires et distinctes en toutes circonstances où nous devons juger ; imprimer en notre mémoire la résolution de ne juger que de ce que nous concevons clairement et distinctement ; cf. AT VII 61) ; la lettre à Mesland du 2 mai 1644 réaffirmera la compatibilité de la liberté avec l’infaillibilité à propos du Christ et des bienheureux (AT IV 117) : or accorder cette thèse avec la stratégie générale de la Méditation IV constitue une réelle difficulté dont l’A. ne fait aucun cas. (2) Le chapitre 7 développe deux thèses : [A] que D. a soutenu une conception cohérente de la liberté de 1641 à 1645 ; [B] que la spontanéité entendue comme auto-détermination rationnelle, ou encore comme autonomie, est essentielle à la liberté, non le pouvoir d’agir autrement. Cette dernière thèse implique d’entendre le vel potius articulant les deux clauses de la définition du libre arbitre dans la Méditation IV (AT VII 57) comme une forme de rétractation de la première clause (à peine évoquée par l’A.) et à faire consister l’essence de la liberté dans la seconde. Mais l’A. s’efforce en fait surtout d’étayer [A] en la confrontant aux Principes I, 37 et à la lettre à Mesland du 9 février 1645, alors qu’il néglige la complexité constitutive de cette dernière relativement aux deux formes de la liberté. En dépit de ces réserves, l’ouvrage demeure philosophiquement stimulant et certaines de ses thèses appellent discussion.

Jean-Pascal Anfray

2.1.11. CLARKE, Desmond M., « The Epistemology of Descartes », in HETHERINGTON, Stephen (éd.), Epistemology. The key thinkers, Londres, Continuum International Publishing Group, 2012, 224 p., p. 90-110.

2.1.12. COTTINGHAM, John, « The Desecularization of Descartes », in FIRESTONE, Chris & JACOBS, Nathan (éd.), The Persistence of the Sacred in Modern Thought, University Notre Dame Press, Notre Dame, Indiana, 2012, p. 15-37.

Aucun philosophe moderne, du XVIe au XIXe siècle, n’a pu se passer de Dieu, pour le prouver, le nier ou en limiter les effets. Cette collection d’essais s’efforce de le montrer chez Spinoza et Locke jusqu’à Hegel, Schelling et Kierkegaard. Nietzsche est absent de cette énumération, qui commence avec D. La démonstration a été confiée à J. Cottingham, coéditeur des Philosophical Writings of Descartes (2 vol., Cambridge, 1985). « Je suis en colère quand je vois qu’il y a des gens au monde si audacieux et si impudents que de combattre contre Dieu » : il faut prendre en compte ce que D. écrit à Mersenne le 25 novembre 1630 : non seulement en termes de conviction personnelle, mais surtout en fonction de l’enracinement métaphysique de toute sa philosophie, à commencer par son projet d’un système du monde. Mettre entre parenthèses ses tentatives d’apporter au christianisme une validation définitive revient à curieusement amputer sa pensée. La taille du texte ne permettait pas de grands développements (sur l’Incarnation, sur la Genèse, sur le libre-arbitre, sur la Transsubstantiation, etc.), mais l’A. s’en est tenu à l’essentiel : l’exercice de la raison conduit D. à reconnaître qu’il ne tient pas de lui-même cette raison (et les vérités absolues qu’elle atteint). Ce rationalisme transcendant a encore beaucoup à nous apprendre.

Jean-Robert Armogathe

2.1.13. D’AGOSTINO, Simone, « I sentieri interrotti del metodo : Bacon, Descartes, Spinoza e la questione del fondamento », in GILBERT, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

2.1.14. DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p.

Ce volume se présente, au moins dans son titre, comme un « guide » aux Meditationes et contient une série d’articles signés par une partie des meilleurs spécialistes dans le domaine anglo-américain. Les onze essais qui le composent sont distribués en quatre sections qui, sans être identifiables directement aux Meditationes particulières, s’attachent à des problématiques spécifiques émanant du texte cartésien. À la différence des autres introductions ou guides en langue anglaise (voir par exemple le Blackwell Guide édité par St. Gaukroger, Malden, 2006, BC XXXVII, 3.1.6 ; ou bien encore l’Introduction aux Méditations de C. Wilson, Cambridge, 2003, BC XXXIV, 3.1.133), il se focalise ainsi, plus que sur le texte cartésien, sur un choix de thèmes qui lui sont liés. Mobilisant une méthodologie de recherche qui veut concilier une approche « philosophique » et une lecture qui insère les œuvres philosophiques dans leur milieu culturel et historique, ce volume constitue un témoignage significatif des problèmes philosophiques qui, dans les Meditationes, intéressent le plus le public anglo-américain. L’ouvrage est composé de quatre sections.

(1) Dans une première section, consacrée au scepticisme, l’article de T. Lennon et M. Hickson (« The Skepticism of the First Meditations », p. 9-24) aborde le problème du doute et de son extension. Selon les A., la Première Méditation répond à des exigences de rationalité qui, d’une part, invalident les figures des fous et du malin génie, mais en même temps permettent de ne pas invalider le cogito ; à partir du présupposé (tout à démontrer) que la vérité du cogito nécessite la garantie divine, ils concluent que cette connaissance ne tombe pas sous le doute, car douter d’elle serait unreasonable. L’essai de D. Brown (« Descartes and content skepticism », p. 25-42) examine le rapport de D. avec le scepticisme ancien, en soutenant que la nouveauté introduite dans les Meditationes serait ce que l’A. appelle un « content skepticism », c’est-à-dire l’invalidation du contenu même de notre représentation dans ses conditions de véridicité possible. Ce type de scepticisme – que l’A. repère dans la figure du Dieu trompeur (désignée un peu maladroitement comme « demon hypothesis ») et dans la thèse des idées matériellement fausses – laisse encore de la place, selon D. Brown, à un scepticisme résiduel dans les Meditationes. (2) La deuxième section du volume, portant sur la substance et la cause, s’ouvre avec l’article de D. Garber sur le développement progressif de la conception de substance des Meditationes aux Quartae Responsiones (« Descartes against materialists : how Descartes’ confrontation with materialism shaped his metaphysics », p. 45-63) : l’A. insiste sur le rôle joué par les objections de Hobbes pour le dépassement de l’ousiologie proposée dans les Meditationes et dans les Secundae Responsiones : ce sont les IIIae Objectiones qui auraient poussé D. à mettre à point la théorie de l’attribut principal proposée pour la première fois à Arnauld. L’analyse, précise et subtile, contribue, de manière significative, à mettre en évidence un aspect que la littérature critique a remarqué ces dernières années : la maturation in progress de la métaphysique cartésienne, à partir de la composition des Meditationes, jusqu’aux Responsiones pour enfin parvenir aux formulations des Principia. L’essai de M. Bolton (« Thinking : the nature of Descartes’ mental substance », p. 64-81) traite de la constitution de la substance, et en particulier du rapport de celle-ci avec ses modes. Le problème du statut de la substance pensante en tant que telle, c’est-à-dire de sa distinction par rapport à ses déterminations particulières, est abordé à travers un examen des discussions qui se sont produites au XVIIe siècle (Arnauld, Malebranche, Leibniz). Selon l’A., la conception de D. s’insère dans une matrice néoplatonicienne diffusée au XVIIe siècle, selon laquelle un étant intrinsèquement indéterminé sous un aspect particulier peut, sous ce même aspect, passer à l’être déterminé en vertu de certains états qu’il assume. On regrettera cependant que cette solution soit proposée sans la moindre discussion historique tant sur le néoplatonisme à l’âge classique que sur le rapport entre ce courant et D. La contribution de T. Schmaltz (« Causation and causal axioms », p. 82-100) porte sur les trois axiomes sur la cause énoncés dans les Rationes more geometrico (AT VII 164-165) : l’auteur montre que leur application dans les Meditationes est soumise à des variations par rapport aux contextes et que la conception cartésienne de la causalité se modifie et se précise dans le passage des Meditationes aux Responsiones (un des exemples plus significatifs est celui de la causa sui, conçue en Meditatio III sous le modèle de l’efficience, et ensuite dans les Quartae Responsiones sous celui de la cause formelle). (3) La troisième section s’ouvre avec l’article de J. Carriero (« Sensation and knowledge of body in Descartes’ Méditations », p. 103-126), qui discute la validité de la thèse attribuant à D. un réalisme indirect à propos de la connaissance sensible : selon Carriero (qui développe ici des lignes de réflexion de son Between two worlds, Princeton, 2008, BC XL, 3.1.32), la thèse cartésienne sur le rapport entre les idées des sens et les objets représentés par elles serait encore marquée par un réalisme direct : sur la base de cette interprétation, le lien causal direct entre les choses et les idées des sens serait encore respecté, mais non en termes de ressemblance entre l’idée et sa cause. Le lien direct entre l’idée et les choses matérielles ne serait pas rompu, mais conçu à partir d’une distance qui rend impossible l’interprétation des qualités des objets sur la base des idées sensibles, obscures et confuses, que nous en avons. Le cas de la fausseté matérielle par rapport au statut de la représentation fait l’objet de l’article de G. Hatfield (« Descartes on sensory representation, objective reality, and material falsity », p. 127-150). Selon l’A., la ressemblance entre l’idée et son objet est le paradigme à partir duquel D. pense le statut représentationnel de l’idée ; l’A. questionne alors le statut des idées matériellement fausses : celles-ci n’auraient pas, selon leur phénoménalité propre, un statut représentatif. Mais si l’on admet (comme le fait D. dans la Dioptrique) que les couleurs dépendent de la surface des choses matérielles qui reflètent les rayons lumineux, alors, selon Hafiled, l’on peut admettre que ces idées sont, bien que de manière obscure et confuse, des représentations des choses extérieures. Cela permettrait de lire de manière plus cohérente la théorie cartésienne de l’idée, à l’intérieur de laquelle le cas des idées matériellement fausses constituerait seulement un cas limite. (4) La dernière section, consacrée à l’être humain, s’ouvre avec l’essai de K. Detlefsen (« Teleology and nature in Descartes’ Sixth Méditation », p. 153-175) sur l’emploi d’arguments de type téléologique dans la Sixième Méditation (cf. AT VII, 82-85). À partir d’un « conceptual background » concernant les différences entre l’approche platonicienne et l’approche aristotélicienne des arguments téléologiques (mais là encore sans aucune référence au statut de ce type d’arguments au xviie siècle), l’A. propose de considérer le rapport entre l’esprit et le corps non selon un modèle hylémorphique, mais à partir d’une relation de satisfaction dans laquelle l’âme reconnaît une valeur propre et intrinsèque au corps. L’essai de L. Alanen (« The role of will in Descartes’ account of judgement », p. 176-199) s’arrête sur la volonté et sur le rapport entre l’indifférence et la détermination vers le bien dans l’acte volitif : la thèse défendue consiste à montrer que l’opération de la volonté s’articule en deux moments : la poursuite du bien et du vrai fait, en elle-même, l’objet d’une détermination ; et c’est à partir de cette détermination que la volonté est inclinée vers le bien. L’A. conclut son analyse en soulignant la proximité – mais aussi la distance – entre les conceptions de D. et de Spinoza. Dans son intervention (« God and meditation in Descartes’ Méditations », p. 200-225), J. Secada se propose de montrer le rapport entre le style méditatif de l’ouvrage cartésien et la connaissance de Dieu qui en est un des objets principaux. Lisant les Meditationes comme un « therapeutic manual », il prend de la distance par rapport à toute lecture qui insiste sur l’aspect formel de l’argumentation cartésienne : la validité de la théologie des Meditationes dépend moins d’une suite d’arguments que de la contemplation de l’idée de Dieu, la vraie difficulté se trouvant dans la découverte de cette même idée. En considérant la méditation cartésienne comme un « intellectual mysticism » (p. 211), il souligne que le procès méditatif mène non seulement à la connaissance de quelques vérités, mais aussi au plus haut bonheur dont on peut jouir dans cette vie (AT VII 52). Le dernier essai, dû à L. Shapiro (« Cartesian selves », p. 226-242), se propose de regarder de plus près la conception cartésienne du self. Selon l’A., bien que valide, la thèse qui fait consister le sujet cartésien dans le fait d’être une substance qui pense se révèle trop pauvre et limitée : si l’on considère que le parcours méditatif contribue de manière essentielle à la constitution du self, alors, pour la compréhension de celui-ci, on devra tenir compte des déterminations psychologiques intrinsèquement impliquées dans l’exercice de la méditation. Les deux composantes principales, requises pour que l’ego puisse bien méditer, sont, selon Shapiro, le rôle de la mémoire, qui garantit l’unité dans le temps de la pensée qui médite ; l’exercice de la vertu intellectuelle qui oriente le sujet vers la recherche de la vérité. L’intégration de ces deux éléments permet, selon l’A., une compréhension plus complexe et plus riche, dans laquelle la dimension psychologique et personnelle devient un facteur essentiel et constitutif du self.

Ces études sont, à différents titres, originales et bien insérées dans le contexte du débat anglo-américain, dont elles représentent une importante mise à point. Il paraît néanmoins légitime de se demander, justement, dans quelle mesure l’horizon de ce contexte est essentiel pour leur compréhension, s’il en constitue un mérite ou une limite : tout dépend de ce que le lecteur demande à un ‘guide critique’ des Meditationes. Il est en tout cas significatif que la bibliographie soit presque totalement de langue anglaise, sauf dans quelques rares cas. Le choix même des sections qui divisent le volume semble mettre en premier plan la perspective interprétative par rapport au donné textuel, mais c’est là un choix délibéré et conscient de l’éditeur.

Massimiliano Savini

2.1.15. DEVILLAIRS, Laurence, « La philosophie négative de Descartes » in CAPELLE-DUMONT, Philippe, Dieu en tant que Dieu. La question philosophique, Paris, Le cerf, 2012, p. 57-69.

2.1.16. EBISAWA, Zenichi, « Descartes no kaigi [Le doute de Descartes] », in Tetsugaku kogi [Cours de la philosophie], Chiba, Azusa syuppan, chap. 6 [en japonais].

2.1.17. GAL, Ofer & CHEN-MORRIS, Raz, « Nature’s drawing: problems and resolutions in the mathematization of motion », Synthese, 185, 3, 2012, p. 429-466.

2.1.18. GARBER, Daniel, « Descartes against the materialists : how Descartes’ confrontation with materialism shaped his metaphysics », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 45-63.

2.1.19. GIANNETTO, Giuseppe, Idee Innate e Ontologia della mente in Cartesio, Naples, La Scuola di Pitagora editrice, 2012, 187 p.

2.1.20. GIANNETTO, Giuseppe, Intuire e pensare. Studi su Cartesio, Kant e Jaspers, Naples, La Scuola di Pitagora editrice, 2012, 172 p.

2.1.21. GRESS, Thibaut, Descartes et la précarité du monde, Paris, CNRS-Editions, 2012, 388 p.

Voici un livre qui met mal à l’aise le recenseur par principe curieux d’interprétations spéculatives sur D. ; car parti pour gratifier l’A. de son ambition rare, il lui reprochera finalement sa présomption, rare aussi. La thèse de l’ouvrage est que le doute, irréductible à une fonction méthodologique, vise à « mettre en forme une expérience ontologique qui n’est autre que celle de l’intrinsèque précarité du monde » (Partie I ; ici, p. 96) ; à ce doute résistent l’ens ut demonstratum (l’ego et Dieu, Partie II) et l’ens ut potentia (Dieu, Partie III), en une double ontologie qui permet de reposer la question de l’union de l’âme et du corps (Partie IV). L’enjeu, annoncé très tôt, est de proposer une interprétation humaniste et renaissante de D., au moyen d’une discussion serrée, notamment avec Heidegger et Marion (dont la double onto-théo-logie, on l’aura compris, est l’horizon polémique du volume). Le malheur est que, outre l’indétermination du concept de monde (malgré la p. 37), les contresens s’enchaînent avec une virtuosité incomparable (la seule que nous reconnaissions à l’A.), comme si, pour prendre place parmi les grands commentateurs (« de Gouhier à Brunschvicg » [sic !], mais aussi Alquié, « Guéroult » [sic] et Marion), il fallait soutenir l’inédit, c’est-à-dire souvent l’insoutenable. Car ce qui dans cet ouvrage est vrai était connu avant lui ; ce qui y est neuf est faux. De tels travers sont mal masqués par le style ampoulé jusqu’à l’incorrection et le ton professoral avec lequel sont distribués aux uns et aux autres bons et mauvais points. On regrette que l’A. n’ait pas été plus attentif à réfuter ses propres hypothèses plutôt que celles des autres.

Dan Arbib

2.1.22. GUENANCIA, Pierre, « Le fantôme de Descartes : De l’utilité de l’histoire de la philosophie », Esprit, 2012, 383, p. 150-164.

L’ambition de cet article est de démontrer à qui en douterait encore la vivacité de l’histoire de la philosophie dans les débats d’idées contemporains : c’est le propre des grandes questions philosophiques de traverser le temps. Ainsi en va-t-il de la pensée du rapport esprit-corps que l’histoire de la philosophie peut (et doit) contribuer à nourrir. C’est au sein de cette grande question que l’A. convoque la « théorie du dualisme cartésien ». La position cartésienne constitue, à certaines conditions, un rempart contre le matérialisme ambiant des sciences cognitives. La thèse de l’A. consiste à mobiliser la réflexion cartésienne non pas tant au nom des réponses que D. a déjà fournies sur le sujet (récusant d’ailleurs par avance la légitimité d’un dualisme cartésien), mais parce que les « solutions » du cartésianisme sont « articulées sur les phénomènes eux-mêmes » (p. 152), c’est-à-dire sur un donné dont chacun fait l’expérience et qui fournit la base d’une discussion toujours à venir : « Personne aujourd’hui ne peut considérer comme un sujet de discussion l’hypothèse cartésienne d’une glande pinéale située à la base du cerveau, en un endroit où l’âme serait plus particulièrement logée […]. Mais le problème de la communication entre les diverses parties du corps et l’unité de l’esprit demeure entier aujourd’hui comme du temps de Descartes » (p. 156). Si les réponses appartiennent à l’histoire de la philosophie, les questions la transcendent. Utilisant les acquis de la méthode cartésienne pour réinterroger la pensée du rapport esprit-corps dans des termes actuels, l’A. s’emploie ensuite à philosopher, id est à montrer l’utilité de l’histoire de la philosophie sur cette question précise : il s’agit de mettre à mal le réductionnisme matérialiste au nom de l’évidence de « l’expérience que l’esprit fait de ses propres opérations » de sorte que « l’esprit sait de lui tout ce qu’il y a à savoir, et il le sait de façon certaine, bien plus certaine que tout ce qui a trait au corps, qui peut toujours être remis en question » (p. 158). L’A. en appelle ensuite à la supériorité cartésienne de la connaissance de l’esprit par lui-même pour défendre « une conception distinctive de l’esprit et du corps » (p. 163). Cette conception de la distinction permet de repenser l’union sur le mode de l’expérience universelle que chaque esprit peut en faire. Elle interdit finalement la réduction de l’esprit à la matière et libère un champ que la philosophie doit continuer d’investir : la science de l’esprit.

Julia Roger

2.1.23. GUENANCIA, Pierre, Descartes et l’ordre politique, Paris, Gallimard, 2012, 406 p. ; réédition de l’ouvrage de 1986 augmenté d’une préface et d’une postface.

2.1.24. HENRY, Michel, 2012. « Heidegger, Descartes, Nietzsche : Schopenhauer et le courant souterrain de la métaphysique », Les études philosophiques, 2012,102/3, p. 307-317.

2.1.25. HERREMAN, Alain, « La fonction inaugurale de la Géométrie de Descartes », Revue d’histoire des mathématiques, 2012, 18/1, p. 67-156.

2.1.26. HILL, James, Descartes and the Doubting Mind, Londres, Continuum, 2012, 176 p.

2.1.27. HIRATA, Celi, « Sistema em Leibniz e Descartes », Trans/Form/Acao. Revista de Filosofia, 35, 1, 2012, p. 23-35

2.1.28. JANIAK, Andrew, « Newton and Descartes : Theology and natural philosophy », The Southern Journal of Philosophy, 2012, 50/3, p. 414-435.

2.1.29. JOLY, Bernard, Descartes et la chimie, Paris, Vrin, « Mathesis », 2012, 256 p.

On se souvient qu’à l’occasion du colossal congrès sur D. de l’Association des Sociétés de Philosophie en Langue Française de 1996, l’A. avait présenté une communication programmatique intitulée « Descartes et la chimie » dans laquelle il développait les conséquences de la thèse selon laquelle « il n’y a pas de chimie cartésienne » (B. Bourgeois et J. Havet (éd.), L’esprit cartésien, Paris, Vrin, 2000, t. I, p. 216). Une quinzaine d’années plus tard, cette affirmation est devenue une question sur laquelle s’ouvre le présent volume (p. 7 : « Existe-t-il une chimie cartésienne ? »). Entre temps, plusieurs études particulières remarquées ont rendu compte de l’avancée des recherches de l’A. qui en livre aujourd’hui le fruit : un petit volume constituant la somme des références cartésiennes à l’alchimie/la chimie, depuis ce qui est présenté comme le rejet de l’instauration d’une physique essentiellement mécanique à la « fortune de la chimie cartésienne » chez ses continuateurs (chap. 175-215). L’ouvrage reprend de manière exhaustive les lieux de l’explication cartésienne avec la chimie et la science secrète. On regrette donc qu’il ne propose pas de mise au point plus engagée sur certains clichés relativement auxquels une surprenante réserve est maintenue, comme la crédibilité du mouvement rosicrucien au début XVIIe siècle, dont la consistance a déjà été mise à mal par E. Mehl dans Descartes en Allemagne (Strasbourg, 2001, BC XXXII, 2.1.12) et, plus encore, par D. Kahn dans Alchimie et paracelsisme (Genève, 2007). Reste qu’aucune étude sérieuse des enjeux intellectuels de la physique cartésienne en regard de la science naturelle de son temps ne pourra, avec un regard un tant soit peu critique, faire l’économie de cet ouvrage, modeste par son envergure, mais très utile par son contenu.

Xavier Kieft

2.1.30. JORGENSEN, Larry M., « Descartes on Music: Between the Ancients and the Aestheticians », British journal of aesthetics, 2012, 52, 4, p. 407-424.

2.1.31. KANAMORI, Osamu, « Descartes no shogeki [Le choc de Descartes] », in Doubutsu ni tamashii wa arunoka seimei wo mitsumeru tetsugaku [Les animaux possèdent-ils l’âme ? : la philosophie pour regarder la vie], Tokyo, Chuokoron-shinsha, Chapitre 2, p. 42-84 [en japonais].

2.1.32. KATO, Hisatake, « Seiyo shiso ni okeru jita – Descartes no jita wo megutte, hoka [Soi-même et autrui dans la pensée occidentale – autour de soi-même et d’autrui de Descartes, etc.] », in Ningen to kokishin [L’homme et l’esprit de contribution], Tokyo, Fuyoshobo, 2012, chap. 1, p. 29-98 [en japonais].

2.1.33. KIEFT, Xavier, « Ce que Chandoux pourrait nous apprendre de Descartes », dans Nicolas de Villiers, sieur de Chandoux, Lettres sur l’or potable suivies du traité De la connaissance des vrais principes de la nature et des mélanges et de fragments d’un Commentaire sur l’Amphithéâtre de la sapience éternelle de Khunrath, Textes édités et présentés par Sylvain Matton avec des études de Xavier Kieft et Simone Mazauric, préface de Vincent Carraud, Paris-Milan, SÉHA-Archè, « Anecdota », 9, 2012, p. 163-208

2.1.34. LÁZARO, Raquel, « Descartes y las pasiones humanas », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 249-257

2.1.35. LIOTTA, Daniel, Cours de métaphysique moderne, Paris, Hermann, 2012, 422 p.

Professeur en classes préparatoires littéraires, l’A. propose ici un parcours de la « métaphysique moderne » qui s’arrête sur quelques principales figures (Spinoza, Kant, Hegel, Nietzsche), prolongé par une réflexion sur le lien de l’ontologie et des sciences humaines à partir de Sartre et Foucault. La première étude, consacrée à « L’innéité selon Descartes » (p. 49-74), tâche de montrer que D. remplit un « programme métaphysique » dit « classique », déterminé au préalable comme élaboration d’« objets métaphysiques susceptibles de satisfaire au “principe de raison” » (p. 40), entendu comme « injonction de rendre raison de tout » (p. 19) : programme qui, énoncé sans restriction, paraît assez peu cartésien. L’enquête prend d’abord pour cible l’idée de Dieu (p. 59), puis s’interroge sur le sens de l’innéité des idées mathématiques et des idées sensibles, jusqu’au point où deviennent problématiques la contingence de l’idée adventice (p. 72), mais aussi la fondation ultime du savoir : d’une part l’innéité n’est pas la possession d’idées toutes faites (« penser […] c’est être l’auteur de ses idées et pouvoir élucider les conditions de cette autorité », p. 73), mais, d’autre part, ces conditions renvoient à la transcendance créatrice de Dieu, constituant ainsi, pour la connaissance, une « tutelle ontologique » (p. 74) qu’il faudra, selon l’A., critiquer (avec le « transcendantal selon Kant », dont l’exposition, p. 75-101, renoue souvent le dialogue avec Descartes). L’ensemble est vivement mené, très clair, souvent précis, mais un petit peu attendu. D’assez nombreuses coquilles.

Guillaume Coqui

2.1.36. MASAI, Keiko, « Descartes ni okeru Cogito to shinri : saisho no mottomo kakujitsu na ninshiki [Cogito cartésien et vérité : la première et plus certaine connaissance] », Bulletin of Hosei Society for Philosophy, 8, 2012, p. 13-28 [en japonais].

2.1.37. MISAKI, Kazushi & MIZUNO, Kunihiko, « Descartes – shinri no fukakushin kara no dakkyaku [Descartes – la sortie de l’incertitude de la vérité] », in MISAKI, Kazushi & MIZUNO Kunihiko (éd.), Seiyou tetsugaku no kiseki : Descartes kara Negri made [Traces de la philosophie occidentale : de Descartes à Negri], Kyoto, Koyoshobo, 2012, section 1, p. 1-11 [en japonais].

2.1.38. MOORE, Adrian W., The Evolution of Modern Metaphysics. Making Sense of Things, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, xxi-668 p., chap. 1, « Descartes : Metaphysics in the Service of Science », p. 25-43.

2.1.39. MOREAU, Denis, Dans le milieu d’une forêt. Essai sur Descartes et le sens de la vie, Montrouge, Bayard, 2012, 342 p.

Les ouvrages d’histoire de la philosophie sont souvent des exercices académiques produits par des érudits désireux de comprendre ou de faire comprendre la pensée d’un philosophe mort depuis longtemps à un lectorat plus ou moins érudit. Quoiqu’utiles et importants, de tels travaux ont tendance à être impersonnels. L’ouvrage de D. Moreau, l’un de nos plus fins historiens de la philosophie classique, peut parfaitement être lu dans cette perspective neutre. On se félicite de voir rassemblés en un seul recueil d’anciens articles, des introductions à des éditions de D. ainsi que des études inédites, réunis sous un unique thème : le sens de la vie, et donnant à voir un D. profondément préoccupé par les questions de la valeur, de la recherche de la vérité et de la vie bonne.

Reste que l’A. n’est pas neutre, et il serait regrettable de lire ce livre comme un simple recueil d’études savantes. Le D. dont il est question ici n’est pas qu’un philosophe du passé, mais une sorte de conseiller spirituel dont les vues sur le sens de la vie ont conservé toute leur force et dont on peut montrer la pertinence comme métaphysicien ou philosophe moral en mettant l’accent sur ce que l’A. appelle son « efficacité spéculative et existentielle » : les thèmes et les outils conceptuels de la philosophie cartésienne peuvent être mobilisés pour examiner nos valeurs et nos cadres intellectuels contemporains. Certes, il pourrait sembler paradoxal de recourir au XVIIe siècle pour éclairer la philosophie contemporaine, mais l’A. défend avec beaucoup d’à-propos non seulement l’utilité, mais aussi la nécessité d’une distance accrue par rapport à nos idéaux et à nos problèmes familiers. D’où le caractère personnel d’un volume dont la présente recension ne peut que partiellement témoigner. Depuis plusieurs décennies, dit l’A., la philosophie de D. « me nourrit, me guide et m’aide à trouver des réponses à la question que chacun se pose et qui nous hante peut-être spécialement, nous modernes, qui souvent ne savons pas trop où nous en sommes et par où aller : que vais-je faire de ma vie ? » Descartes, nous dit-il, lui a sauvé la vie et a considérablement contribué à l’améliorer. Montrer comment cela a pu être possible, nous convaincre que D. est un guide tout indiqué « lorsqu’on est désorienté sur les chemins de la vie » et que sa fréquentation peut améliorer notre vie, tels sont les objectifs de ce livre : un homme qui ne s’est jamais marié, qui mena une vie de l’esprit dans une campagne hollandaise relativement isolée, peut servir de guide dans des matières comme les relations conjugales, la poursuite des plaisirs ou l’attrait de la télévision. Le résultat est convaincant et la lecture passionnante.

Arrêtons-nous sur deux articles particulièrement révélateurs de cette perspective riche, inspirante et émouvante. (1) Après un bref chap. d’ouverture (« Quod vitae sectabor iter ? ») focalisé sur le Discours de la méthode, l’A. propose un large éventail de réflexions sur son iter vitae philosophicae personnel : « Éléments pour un autoportrait de l’auteur en cartésien » : l’A. revisite son propre itinéraire philosophique (« je n’ai jamais réussi à dissocier la philosophie de la vie »), inspiré par la lecture incessante de D. et par la Troisième partie du Discours, en particulier la « puissance pratique » de la « morale par provision », puissance dont le rôle fut de soutien sur le plan professionnel et personnel. Quoique ce texte ne soit pas, à proprement parler, une étude sur D., il met très concrètement en lumière la manière dont la philosophie cartésienne peut guider une vie et constitue un subtil plaidoyer en faveur d’une philosophie qui ne soit pas exercice purement analytique, mais spirituel. (2) Sur la base de la distinction cartésienne entre l’intellect et imagination, l’étude intitulée « Imaginer » montre les limites de la pensée par images pour la compréhension des objets non matériels (Dieu, la justice, le moi). Appliquée à notre culture obsédée par les écrans, une telle analyse débouche sur une critique cartésienne de la télévision et des autres formes de pensée ou de perception procédant par images, un peu analogue (Moreau y insiste) à la critique kantienne de la raison : bref, la télévision n’est pas le lieu approprié à la spéculation métaphysique. Vérité qui peut sembler triviale ou convenue, mais à laquelle un tel chap., distrayant et bien écrit, confère une clarté et un charme incontestables. Cet ouvrage est ainsi une véritable contribution aux études cartésiennes, non seulement d’un point de vue historique, mais aussi du point de vue de ses implications pour notre vie.

Steven Nadler

2.1.40. MURAKAMI, Katsuzo, « Descartes to kindai keijijougaku [Descartes et la métaphysique moderne] », in KANZAKI, Shigeru, KUMANO, Sumihiko & SUZUKI, Izumi (éd.), « Post modern » no mae ni, Seiyou tetsugakushi 3 [Avant le «postmodernisme », Histoire de la philosophie occidentale, 3], Tokyo, Kodansha, chap. 3, p. 147-194 [en japonais].

2.1.41. MURAKAMI, Katsuzo, « Descartes to Leibniz – Lebniz ha Descartes to donoyouni taiketsu shita noka [Descartes et Leibniz – comment Leibniz affronte Descartes] », in SAKAI, Kiyoshi, SASAKI, Yoshiaki & NAGATSUNA, Keisuke, Gottfried Wilhelm Leibniz, Tokyo, Hosei University Press, Partie II, chapitre 2, [en japonais]

2.1.42. MURASE, Kou, « Shinshin mondai no imi to muimi : Merleau-Ponty, Descartes, Levinas [Le sens et le non-sens de la problématique de la dualité de l’âme et du corps Merleau-Ponty, Descartes, Levinas], Azur (13), 2012, p. 59-76 [en japonais].

2.1.43. NAKAMOTO, Mikio, « Enhancement mondai ni kansuru gijutsu tetsugaku no kanten kara no ichi kousastsu : F. Bacon, Descartes, Platon oyobi Aristoteles ni sokushite [Approche des problèmes de l’amélioration selon les philosophies de Bacon, Descartes, Platon et Aristote] », Annual report of the Humanities Reserch Institute : Chikushi Jogakuen University and Junior College, 23, 2012, p. 243-257 [en japonais].

2.1.44. NOVÁK (Aleš), Zázračná věda: filosofie René Descartesa 1618-1620 [La science admirable : la philosophie de René Descartes 1618-1620], Praha Togga, 2012, 447 p. [en tchèque].

2.1.45. OKADA, Taketo, « Descartes to oujo Élisabeth : shinshin nigenron to shinshin mondai no tanjou [Descartes et la princesse Élisabeth : naissance du dualisme et du problème de l’âme et du corps] », in Shinshin mondai monogatari : Descartes kara ninchikagaku made [Histoire du problème de l’âme et du corps : de Descartes à la science cognitive, Introduction à la science de l’esprit, 1], Kyoto, Kitaooji Shobo Publishing, chap. 1 [en japonais].

2.1.46. ONG-VAN-CUNG, Kim Sang, Descartes et l’intentionnalité, Paris, Vrin, 2012, 352 p.

2.1.47. OTSU, Shinsaku, « Descartes kara Spinoza he [De Descartes à Spinoza] », in Shiko no jiyuu toha nanika Spinoza to Simon-Nicolas-Henri Linguet ni okeru jiyuu [Quelle est la liberté de penser ? la liberté chez Spinoza et Simon-Nicolas-Henri Linguet], Kyoto, Koyoshobo, chap. 1, p. 1-26 , [en japonais].

2.1.48. OTSU, Shinsaku, « Shiko no jiyu to genjitsu nojiyu – Descartes ni totte no jiyu [Liberté de la pensée et liberté de la réalité – la liberté pour Descartes », in Shiko no jiyuu toha nanika Spinoza to Simon-Nicolas-Henri Linguet ni okeru jiyuu [Quelle est la liberté de penser ? la liberté chez Spinoza et Simon-Nicolas-Henri Linguet], Kyoto, Koyoshobo, chap. 4, p. 86-125, [en japonais].

2.1.49. SADRI, Jamshid & RAHMANI, Gholamreza, « An Analysis and Explanation of Descartes’ Methodological Skepticism », History of Philosophy. Journal of the International Society of the History of Philosophy, 2, 3, 2012, p. 95-120 [en farsi].

2.1.50. SATO, Yasukuni, « Kindai kagaku no seiritsu to tetsugaku (2) – Kindai kagaku no seiritsu to tetsugaku (3) – Descartes no tetsugaku he no hihan » [La formation de la science moderne et la philosophie (2) La formation de la science moderne et la philosophie (3) – la critique sur la philosophie de Descartes] », in Kindai tetsugaku no ningenzo [L’image de l’homme dans la philosophie moderne], Tokyo, Foundation for the Promotion of the Open University of Japan, 2012, chap. 3 et 4 [en japonais].

2.1.51. SHAPIRO, Lisa, « Cartesian selves », in Detlefsen, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 226-242.

2.1.52. SPALLANZANI, Mariafranca, « ‘Trouver quelques vérités dans les sciences’. Les Essais de Descartes entre méthode et découverte scientifique », in MEHL, Edouard (éd.), La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p., p. 47-76.

2.1.53. SPALLANZANI, Mariafranca, « I pensieri della filosofia, le cure della medicina, i conforti della religione », Rivista di Storia Della Filosofia, 2012/1, 67, p. 89-105.

2.1.54. STRAEHLI, Benjamin, « Conscience et réflexion chez Descartes », Revue philosophique de Louvain, 2012, 110/2, p. 203-229.

2.1.55. TAKEDA, Hiroki, « Hajime ni hikari ariki – chi no kijiku to shite no Descartes kougaku [Au commencement était la lumière – l’optique de Descartes comme l’axe fondamental du savoir] », in KANAMORI, Osamu (éd.), Archeology of rationality : a history of science as epistemology in France, Tokyo, University of Tokyo Press, chap. 1, p. 13-92, [en japonais].

2.1.56. TEXIER, Roger, Descartes, la nature et l’infini, Paris, L’Harmattan, 2012, 279 p.

2.1.57. TSUZAKI, Yoshinori, « Seiyou kindai syoki ni okeru kami no rikinou ni kansuru gensetsu : Montaigne kara Descartes he [Discours de la puissance de Dieu aux premiers temps modernes européens : de Montaigne à Descartes] », Journal for the philosophical moments in Tsukuba, 20, 2012, p. 68-81 [en japonais].

2.1.58. UENO, Osamu, « Descartes wa mujun shite iru ka ?: shinshin no jittaiteki kubetsu to gouitsu [Distinction réelle et union substantiel de l’âme et du corps : une contradiction ?]”, Machikaneyamaronso (46) Philosophie, 2012, p. 1-18 [en japonais].

2.1.59. VERBEEK, Theo, « Generosity », in Ebbersmeyer Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 19-30.

2.1.60. YAMAMOTO, Shin, « Descartes », in Sokrates, Platon, Aristoteles, Augustinus, Thomas Aquinas, Descartes, Tokyo, Hokuju, chap. 6, p. 196-234 [en japonais]

2.1.61. YOSHIDA, Kentaro, « ‘Shii suru mono’ no jitsuzai ni tsuite – Descartes ‘Cogito ergo sum’ saiko [Sur la réalité de la Res Cogitans : Nouvelles investigation du ‘Cogito ergo Sum’] », Bulletin of Aichi University of Education, Humanities and Social Sciences, 61, 2012, p. 29-37 [en japonais].

2.1.62. ZULUAGA, Mauricio, « El principio de cierre lógico del conocimiento y el escepticismo », Praxis Filosofica, 35, 2012, p. 97-110 [en espagnol].

2.2. CARTESIENS

2.2.1. ABITEBOUL, Olivier, « Ceux qui croient et ceux qui ne croient pas/la passion du paradoxe chez Pascal : foi ou raison ? », in ABITEBOUL, Maurice (éd.), Mythes et croyance au théâtre (Théâtre du monde, cahier n°22), 2012, 473 p., p. 377-382.

2.2.2. ATTALI, Jacques, Les penseurs du monde, Pascal, Marx, Gandhi, Paris, Robert Laffont, 2012, viii-1280 p., contient une réédition du Blaise Pascal ou le génie français, Paris, Fayard, 2000.

2.2.3. BISCHOFF, Jean-Louis, Conversion et souverain bien chez Blaise Pascal, Paris, L’Harmattan, 2012, 200 p.

Que Pascal puisse rester notre contemporain, telle est la conviction fondamentale de l’A. Aussi ne craint-il pas – ce qui est tout à son honneur – d’expliquer « le cœur pascalien » à des designers, dans un langage qui se veut « audible par des post-matérialistes ultramodernes » (p. 172), « délestés de culture religieuse », de manière à les « sensibiliser aux questions relatives à l’intériorité du sens et au sens de l’intériorité » (p. 167). Si touchante que soit cette conviction, et si courageux que soit cet enseignement à l’École Supérieure de Design Industriel de Paris, on pourra douter de l’intérêt de transformer cette attestation autobiographique en un livre qui prétend reprendre – principalement à partir des études d’H. Gouhier – l’analyse des concepts de conversion et de Souverain Bien chez Pascal. En réalité, seules les 88 premières pages de l’ouvrage abordent ces concepts, le reste étant constitué de quatre annexes consacrées à l’athéisme, à l’ennui, à « l’érotisme du Dieu caché pascalien » et, enfin, à ce qu’est le cœur pour les designers, cette dernière annexe répétant d’ailleurs à plusieurs reprises les analyses de la première moitié de l’ouvrage, comme la définition du « cœur pascalien » (« dynamique intérieure » qui « nous permet de nous élancer vers les valeurs », « vibration de l’esprit en présence de la valeur » et « capacité première d’éveil et de vibration à la vérité qui tire l’homme vers le haut », p. 39, puis à nouveau, mot pour mot, p. 173). Pour ce qui intéresse le plus directement le Bulletin cartésien, à savoir le rapport de Pascal à la philosophie, et singulièrement à la philosophie cartésienne, l’A. se contente humblement et très succinctement de « rapporter les positions » (p. 27) de J.-L. Marion dans Sur le prisme métaphysique de Descartes (Paris, 1986 ; BC XVII, 2.1.10), et de V. Carraud dans Pascal et la philosophie (BC XXIV, 2.2.5), le plus souvent appelé La philosophie de Pascal [sic !]. On notera que D. lui-même n’est jamais cité, que Mersenne est un « apologiste traditionnel » (p. 103), et que le « célèbre cri de Montaigne » est « Si j’étais moi » (p. 71). En fin de chapitre, l’A. propose quelques brefs dossiers qui entendent comparer Pascal à É. Levinas, P. Ricœur, J. Greisch, et alii.

Il est extrêmement fâcheux qu’un ouvrage aux prétentions scientifiques fasse si peu cas des textes dont il prétend fournir une analyse conceptuelle. Le lecteur sera stupéfait de constater avec combien peu d’attention l’A. cite Pascal, dont les propos sont déformés, tronqués, au point d’en devenir parfois totalement absurdes. Quelques exemples : p. 12, le divertissement qui, sous la plume de Pascal est « la plus grande de nos misères », devient « la plus grave de nos misères » ; à la ligne suivante : « car c’est cela qui nous empêche principalement de songer à nous. Sans cela… », alors que, au fragment L 414, Pascal ajoutait, après « de songer à nous », « et qui nous fait perdre insensiblement » ; p. 41 : « Nous cherchons le bonheur et ne [!] sommes incapables ni de certitude ni de bonheur » : contresens et saisissant raccourci, puisque le propos de Pascal est le suivant : « Nous recherchons le bonheur et ne trouvons que misère et mort. Nous sommes incapables de ne pas souhaiter la vérité et le bonheur et sommes incapables ni de certitude ni de bonheur » (L 401) ; p. 46, « S’ils la prouvent, ils ne tiendraient pas parole » ; p. 48, « Infiniment éloigné de comprendre les extrêmes [l’homme] est incapable de comprendre de voir le néant d’où il est tiré » ; puis trois lignes plus loin : « ce qu’il est au prix de ce qu’il est » ; p. 63, « aimerait-on la substance de l’âme d’une personne abstraite » au lieu d’« une personne abstraitement ». – Enfin, bien plus qu’une coquille ou un oubli, une phrase est à deux reprises (p. 77 et 174) attribuée à Pascal, dans l’Art de persuader : « un chapon perd-il [son humanité] en perdant ses plumes ? » Et l’A. d’ajouter : « Le sens de ces propos est clair ». Ils n’apparaissent pourtant, on s’en doute, ni dans De l’art de persuader, ni dans De l’esprit géométrique, où Pascal n’attribue pas plus l’humanité aux volailles qu’il ne tient l’homme pour un gallinacé. On regrettera que l’A. qui, p. 130 signale « une coquille très intéressante » dans une citation de Pascal donnée par J.-L. Marion dans Réduction et donation, ait produit tant de « coquilles » si peu dignes d’intérêt.

Seule l’annexe qui entend comparer les analyses pascalienne et heideggérienne de l’ennui aurait pu donner lieu à d’intéressants développements, si elle ne s’en était pas trop modestement tenue à « faire apparaître une éventuelle proximité entre les deux penseurs » (p. 122), en mentionnant simplement quelques rapprochements thématiques et quelques « coïncidences troublantes » (p. 136), tels l’exemple de la montre ou celui d’un livre ennuyeux.

Laure Verhaeghe

2.2.4. BOSCO, Domenico, « La cultura di Port-Royal dentro la storia tra arcaismi e modernità », in Gilbert, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

2.2.5. BRACHTENDORF, Johannes, « The Reception of Augustine in Modern Philosophy », in VESSEY, Mark (éd.), A Companion to Augustine, Wiley-Blackwell, 638 p., 2012, chap. 36, p. 478-491.

2.2.6. BUYSE, Filip, « Le ‘démasquement’ de Descartes par Spinoza dans ‘Les Principia Philosophiae Cartesiannae’ », Teoria. Rivista di Filosofia, 32, 2, 2012, p. 15-43.

2.2.7. CANTILLON, Alain, « 1686, Leibniz-Arnauld, une entrée en communication », in BEAUREPAIRE, Pierre-Yves & HERMANT, Héloïse (éd.), Entrer en communication de l’âge classique aux Lumières, Paris, Classiques Garnier, 2012, 347 p., p. 263-282.

2.2.8. CANTILLON, Alain, « La vie infiniment plastique de Blaise Pascal, ou : La vie, la Vie, et les Œuvres de Pascal, 1665-1684 et 1776-1779 » in BOILLET, Danielle, FRAGONARD, Marie-Madeleine & TROPÉ, Hélène (éd.), Ecrire des vies. Espagne, France, Italie, XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2012, 200 p., p. 135-144.

2.2.9. CANTILLON, Alain, « Les “œuvres complètes” de Pascal au XVIIIe siècle », in DIDIER, Béatrice, NEEFS, Jacques & ROLET, Stéphane (éd.), Composer, rassembler, penser les « œuvres complètes », Saint-Denis, Presses Universitaires de Vincennes, 2012, 404 p., p. 199-242.

2.2.10. CERRATO, Francesco, Un secolo tra politica e passioni. Hobbes, Descartes, Spinoza, Rome, Derive Approdi, 2012, 172 p.

2.2.11. COUSSON, Agnès, L’écriture de soi. Lettres et récits autobiographiques des religieuses de Port-Royal. Angélique et Agnès Arnault. Angélique de Saint-Jean Arnaud d’Andilly. Jacqueline Pascal, préface par Philippe Sellier, Paris, Editions Honoré Champion, 640 p.

2.2.12. DEVILLAIRS, Laurence, « Fénelon : une mystique claire et distincte », in GILBERT, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

2.2.13. DEVILLAIRS, Laurence, « Fénelon lecteur de Descartes », in FRÉMONT, Christiane (éd.), Questions sur la connaissance de soi à l’âge classique, numéro de la revue Corpus, 63, 2012, 139 p., p. 65-82.

2.2.14. DONETZKOFF, Denis, Saint-Cyran épistolier : un maître spirituel au Grand Siècle, Paris, Nolin, 2012, 515 p.

2.2.15. DUPRE, Sven, « Kepler’s optic without hypothesis », Synthese, 2012, 185, 3, p. 501-525.

2.2.16. EDWARDS, Michael, « Suarez in a Late Scholastic Context : Anatomy, Psychology and Authority », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 25-37.

2.2.17. FRÉMONT Christiane (éd.), Questions sur la connaissance de soi à l’âge classique, numéro de la revue Corpus, 63, 2012, 139 p.

2.2.18. FUERTES HERREROS, José Luis, « Entre la transfiguración y la física de las pasiones (1616-1649) », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 185-238 [Sur les Passions de l’âme et François de Sales.]

2.2.19. GATTI, Roberto, « La forza, la giustizia, il corpo politico: Pascal e Hobbes », Filosofia Politica, 26, 2, 2012, 229-246.

2.2.20. GONZÁLEZ, Angel Poncela, « Una aproximación bibliográfica a Francisco Suárez como comentador de la Suma Teológica », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 165-173.

2.2.21. GORDLEY, James, « Suarez and Natural law », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 209-229.

2.2.22. GUENANCIA, Pierre, « Préface », in Frémont Christiane (éd.), Questions sur la connaissance de soi à l’âge classique, numéro de la revue Corpus, 63, 2012, 139 p., p. 7-12.

2.2.23. HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p.

Ce recueil d’essais a pour cible polémique le « relative neglect » dont aurait pâti l’œuvre de Suárez après la première moitié du XVIIe siècle. Parmi les lignes d’enquête permettant d’insister sur l’importance de cet auteur, notons celle de son influence sur quelques-uns des principaux philosophes modernes. Comme le souligne Hill dans son Introduction, à côté de l’indubitable influence exercée par les Metaphysicae disputationes sur la deuxième et troisième scolastique, celle de Suárez sur la modernité demeura moins évidente à l’exception des cas de Leibniz et D. Toutefois, Hill prend aussi acte de la prudence manifestée sur ce point dans l’unique contribution consacrée (partiellement) à D. dans le recueil, à savoir l’article de R. Ariew, « Descartes and Leibniz as Readers of Suárez : theory of Distinctions and Principle of Individuation » (p. 38-53). Dans cette fine contribution, Ariew soutient que, s’il est plausible que D. ait été un lecteur des Metaphysicae disputationes, une telle influence a dû s’émousser après la rédaction des Meditationes ; D., formé à la culture scolastique à La Flèche, en aurait abandonné l’étude entre 1620 et 1640, pour la reprendre seulement après 1640, dans la période qui va de la composition des Responsiones à la rédaction des Principia philosophiae. Plus conformes aux déclarations programmatiques de l’éditeur se trouvent en revanche les autres contributions, toutes visant à établir une ligne de continuité entre Suárez et D. Ainsi, J. Secada (« Suárez on Continuous Quantity », p. 75-86) relève que la discussion cartésienne de la quantité continue se situe plus dans un rapport d’éclaircissement et de développement de son traitement suárezien que de rupture et de révolution (p. 84-86) ; D. Des Chene (« Suárez on Propinquity and the Efficient Cause », p. 89-100) montre la dissolution du modèle suárezien de l’action à distance dans la réduction cartésienne de l’interaction causale au contact immédiat ; H. Hattab (« Suárez’s Last Stand for the Substantial Form », p. 101-118) identifie un axe qui va de Suárez à D. dans la transformation des formes matérielles de substantielles en accidentelles et dans l’éclipse de la causalité formelle au profit de celle matérielle et efficiente (p. 101-118) ; enfin, J. B. South (« Suárez, Immortality, and the Soul’s Dependence on the Body », p. 121-136) relève une analogie avec D. dans la thèse suárezienne de l’impossibilité pour un procès cognitif matériel de produire un résultat cognitif spirituel et vice versa (p. 135-136).

On pourrait émettre quelques réserves sur l’affirmation selon laquelle l’attention prêtée aux rapports entre D. et Suárez est chose récente (p. 18), puisque cet intérêt date au moins du début du XXe siècle, grâce à La liberté chez Descartes et la Théologie (Paris, Vrin, 1913) et à l’Index scolastico-cartésien (ibid.) d’Ét. Gilson, immédiatement suivis par les Thèses cartésiennes et thèses thomistes (Paris, Desclée de Brouwer, 1932) de P. Garin, absents de la bibliographie de l’ouvrage (bibliographie par ailleurs excellente, puisque toutes éditions des œuvres de Suárez ont été indiquées), tout comme le dense article de N. J. Wells sur « Descartes on Distinction » (in F. J. Adelmann, F. J., The Quest for the Absolute, Chestnut Hill, MA ; La Haye, Boston College ; Nijhoff, Studies in Philosophy, 1966, p. 104-134). De plus, la tension partielle entre la ligne d’Ariew et celle du volume dans sa généralité soulève à nouveau le problème effectif de l’influence éventuelle de la scolastique sur D., qui doit sans nul doute préalablement passer par une rigoureuse séparation entre les plans philologique et conceptuel. C’est donc à juste titre que South distingue le niveau des analogies conceptuelles et celui de l’influence historique effective. Il faut en revanche relever que les mêmes analogies conceptuelles devraient, en contexte interprétatif (qui est indubitablement celui dans lequel se meuvent ces essais), être toujours attentivement pondérées : pour en rester au cas de South, ce qu’il définit comme le « cognitive process dualism » est rapproché de la pensée de D. sur la seule base de deux passages sur l’innéisme des idées sensibles des Notae in programma quoddam, dont la conciliation avec d’autres lieux du corpus cartésien est objet de débat parmi les spécialistes (songeons aux pages consacrées à cette question dans le Descartes selon l’ordre des raisons, t. II, de M. Gueroult). Enfin, si une plus grande attention à l’égard de Suárez est sans nul doute souhaitable, on peut aussi légitimement se demander si, en un tel approfondissement, on ne devrait pas éviter certains excès, comme qualifier Suárez de « one of the most important and influential philosophers in all of Europe » (p. 1), affirmation que l’on ne peut partager qu’en la limitant à la sphère de la culture institutionnalisée ; ou comme quand, soulignant l’absence d’entrée consacrée au théologien et philosophe espagnol dans la Stanford Encyclopedia of Philosophy, on place sans hésitation parmi les « entries […] decidedly less interesting, important, and influential » (p. 3) même Giambattista Vico.

Igor Agostini

2.2.24. JUDYCKI, Stanislaw, « Descartes’ Ontological Proof: An Interpretation and Defense », European Journal for Philosophy of Religion. Journal of the Central European Society for Philosophy of Religion, 4, 2, 2012, p. 187-195.

2.2.25. KOLESNIK-ANTOINE, Delphine, « La structure passionnelle de l’âme malebranchiste », in EBBERSMEYER, Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 51-68.

2.2.26. KOLESNIK-ANTOINE, Delphine, « Les voies du corps. Schuyl, Clerselier et La Forge lecteurs du traité de L’Homme de Descartes », in Consecutio temporum, Rivista critica della postmodernità, « Corpo, desiderio, lavoro : per un nuovo materialismo », n°2, février 2012. En ligne :http://www.consecutio.org/2012/02/les-voies-du-corps-schuyl-clerselier-et-la-forge-lecteurs-de-l%E2%80%99homme-de-descartes/

2.2.27. LEBRUN, Gérard, « Pascal : La doctrine des figures », Rue Descartes, 2012/4, 76, p. 113-125, trad. par SARDINHA, Diogo et ZOURABICHVILI, François de la version initiale portugaise (Brésil), Pascal: a Doutrina das Figuras (Tese apresentada ao IV Congresso Nacional de Filosofia – Fortaleza, Novembro de 1962), Fortaleza, Imprensa universitária do Ceará, s.d., 12 p.

2.2.28. LETEY, Claude, Apprendre à philosopher avec Pascal, Paris, Ellipses, 281 p.

2.2.29. LIESENFELD Stefan, Die Spur des Herzens. Meditieren mit Blaise Pascal, Munich, Neue Stadt, 2012, 140 p.

Dans ce livre destiné au grand public, l’A. invite les chrétiens d’aujourd’hui à méditer avec « le grand chrétien » (p. 11) que fut Blaise Pascal. Les quatre parties de l’ouvrage reviennent sur les thèmes majeurs des Pensées (grandeur et misère de l’homme, p. 27-56 ; foi et raison, p. 57-76 ; « pari » et « Mémorial », p. 77-102 ; Jésus comme milieu et médiateur [« Mitte und Mittler »], p. 103-113 ; morale et vie chrétienne, p. 115-138). L’A. s’efforce de mettre en lumière l’actualité des analyses de Pascal (dès la première page, le titre de l’ouvrage se trouve justifié par une citation de… Steve Jobs !). Pascal se révèle ainsi un « bon observateur » plutôt qu’un moraliste (p. 33), qui incarne une « provocation vivante » pour tout lecteur (p. 9 et 115) et le modèle d’une existence chrétienne accomplie dont Gilberte Périer, dans sa Vie, très souvent citée par l’A., nous fournit le récit. Il était presque inévitable qu’une telle approche conduise l’A. à passer sous silence les objets auxquels les études pascaliennes accordent la plus grande attention (nature du projet apologétique ; rapport avec la philosophie et notamment avec celle de D. ; doctrine de la grâce, etc.). Du reste, en voulant faire des Pensées un quasi manuel de dévotion (p. 115), l’A. se voit contraint de revenir sur des thèmes moins fréquentés par les critiques : les mortifications corporelles pratiquées par Pascal (p. 122-126), sa méditation sur « le bon usage des maladies » (p. 130-134) ou son amour pour les pauvres (p. 119-122). L’A. propose donc une méditation assez libre à partir des Pensées dans laquelle le lecteur français retiendra surtout les nombreuses références à Romano Guardini, dont le beau livre, Pascal ou le drame de la conscience chrétienne ([1935], Paris, 1951), mériterait sans doute d’être plus connu.

Alberto Frigo

2.2.30. MANCHA, Louis A. Jr., « Aquinas, Suarez, and Malebranche on Instrumental Causation and Premotion », International Philosophical Quarterly, 2012, 52/3, p. 335-353.

Cet article tente de rejouer le débat entre concurrentisme et occasionnalisme et, notamment, de montrer comment la conception de la causalité de Thomas d’Aquin aurait échappé par avance aux critiques de Malebranche. Dans un premier temps, l’A. explique ce que Thomas entend par causalité instrumentale et se demande si Malebranche rejette toute forme de concurrentisme entre cause première et causes secondes. Il se lance alors dans une conciliation peu convaincante entre les deux philosophes. Enfin, l’A. montre que la conception concurrentiste de Thomas ne peut être réduite à la théorie dominicaine de la prémotion physique, qu’elle n’est donc pas l’objet des foudres de Malebranche et qu’elle a encore de beaux jours devant elle. On ne sait si Thomas attendait le salut de cet article ; ce qui est sûr, c’est que l’A. traite avec beaucoup moins de précautions ses disciples : de façon tout à fait curieuse, il prétend proposer un tableau fidèle de la prémotion physique, non à partir de ses principaux représentants, à savoir Domingo Bañez et Diego Álvarez, mais à partir du résumé qu’en donne Suárez dans ses Disputationes Metaphysicæ qui, pourtant, en est l’un des plus virulents contestataires.

Paola Nicolas

2.2.31. MONASTERIO, Carmen, Pascal. Una filosofía que se trasciende a sí misma, Pamplona, EUNSA, 2012. 323 p.

Si l’on peut se réjouir de la publication, en langue espagnole, d’une étude consacrée à la pensée de Pascal, on regrettera néanmoins que l’A. se soit attaché à adopter un point de vue « en cierta medida interdisciplinar », jugé nécessaire pour comprendre Pascal, et en réalité inutile dans le meilleur des cas. L’ouvrage, composé de sept chapitres, part d’un triple constat (p. 14) : (1) Pascal, malgré son goût pour la science, prend ses distances avec le rationalisme au point de devenir l’« ennemi » de D. ; (2) son scepticisme n’est pas une posture définitive ; (3) son œuvre est une affirmation de Dieu. Tout le problème, on l’aura compris, est d’éclairer les rapports qu’entretiennent philosophie et foi dans les textes de Pascal, et plus particulièrement dans les Pensées – qui ne sont rien de moins qu’une « synthèse » (p. 95) de la pensée de Pascal – de manière à déterminer en quel sens celle-ci constitue une véritable philosophie. L’A. aboutit à la conclusion suivante : bien que Pascal n’ait jamais prétendu « faire de la philosophie » (p. 309), il ne fait aucun doute que ses écrits contiennent un discours philosophique riche de « nouvelles perspectives » ; mais il s’agit d’une philosophie « ouverte » en ce qu’elle est fondamentalement « philosophie de l’homme » et « philosophie morale », entendons : volonté de comprendre l’être humain et de se comprendre soi-même (p. 285). Or Pascal a compris, contrairement à D. – ou plutôt, a fini par comprendre, comme nous le révèle le chapitre consacré à sa biographie –, la finitude de l’homme et la nécessité de ce que le discours philosophique (ou la raison) s’ouvre à la foi (ou à la théologie, ou à la religion). L’A. nous révèle ainsi deux choses essentielles : (1) Pour Pascal, l’homme, sans la foi, ne peut connaître la vérité ; (2) la philosophie de Pascal n’est pas étrangère à la foi mais, « d’une certaine façon », y prépare (p. 17).

On ne s’étonnera pas qu’un ouvrage qui s’attache, avec la plus grande obstination, à se tenir en dehors de toute discipline, et tout particulièrement de la philosophie, échoue à traiter du rapport de Pascal à celle-ci, à poser les données d’un vrai problème, et à proposer une thèse à la fois juste et nouvelle. L’on ne s’étonnera pas non plus que l’A. oppose (discrètement) son point de vue ouvert sur une philosophie ouverte – tout est dans tout – au travail rigoureux et conceptuel (donc étriqué) de V. Carraud dans Pascal et la philosophie, Paris, 1992 (BC XXIV, 2.2.5), dont le propos – on ne s’étonne plus de rien – s’inscrit dans la lignée de la position de V. Cousin, au point que Carraud s’en trouve une fois prénommé Victor. Ce n’est pas que l’A., qui renvoie en tout et pour tout aux p. 40 à 46, puis 28 et 29 de Pascal et la philosophie, ne soit pas sensible à l’œuvre de Carraud et à ses « indéniables réussites » : car, ainsi que celui-ci l’a bien vu, « le problème de fond réside, probablement [!], dans le statut que l’on attribue à la philosophie » (p. 283). L’idée de Carraud est qu’il n’y a aucun sens à poser l’existence d’une philosophie propre à Pascal sans se munir préalablement d’un concept de philosophie. On regrettera que l’A. n’ait pas repris à son compte cette juste idée, et prétende éclairer les écrits de Pascal en faisant l’économie de toute analyse conceptuelle.

Ajoutons que l’ouvrage est émaillé de contresens souvent fâcheux. Pour ne rien dire de la comparaison naïve et caricaturale de D. et Pascal, entre lesquels l’auteur croit trouver des similitudes (par exemple la formation scientifique ou le rejet de la philosophie scolastique) et des différences (D. ne reconnaît que l’autorité de la raison, identifiée à la pensée, et jugée absolue, sans limites, p. 37 ; on notera que les œuvres de Descartes, qui avec Bacon a fondé « l’autonomie de la science », furent publiées entre 1620 et 1640, p. 23), nous nous permettrons de mentionner : (1) la traduction du Mémorial proposée par l’A. aux p. 84 et 85, dans laquelle nous relevons au moins sept coquilles, inexactitudes ou contresens. Ainsi le « sentiment » devient-il conscience : « Certidumbre, certidumbre, conciencia… » (l’A. ne semble pas s’appuyer sur sa propre traduction, puisque « certidumbre » devient « certeza » p. 86) ; et, plus grave, la séparation est séparation d’avec… le monde : « Me he separado (del mundo) » ; parenthèse explicative qu’il eût été préférable d’omettre ; (2) l’affirmation, à la p. 106, de la « préférence de Pascal pour Montaigne » (dont la « philosophie » est résumée « muy a grandes rasgos », p. 25 à 27), quoiqu’il connût bien Epictète, puis, à la p. 128, de « la supériorité de l’esprit de finesse » sur l’esprit de géométrie, ce que confirme la biographie de Pascal qui, comme chacun le sait, est passé de celui-ci à celui-là ; (3) la référence constante à l’« ordre du cœur », jugé décisif pour déterminer le statut de la philosophie pascalienne, et qui n’apparaît comme tel dans aucun texte de Pascal. Le raccourci saisissant qui consiste à télescoper la problématique des trois ordres de choses et celle de la connaissance par le cœur, ou la problématique du divertissement et celle de l’amour-propre (traduit par « egoísmo » p. 275), aurait pu être évité, et la difficulté inhérente aux Pensées prise en compte, si l’auteur s’était donné la peine de consulter l’édition (évidemment jamais mentionnée) des Discours sur la religion, restitués par E. Martineau (Paris, 1992). On aurait pu attendre d’un ouvrage prétendant démontrer en quoi il y a un sens à parler d’une « philosophie de l’homme » chez Pascal – hypothèse en elle-même tout à fait intéressante – qu’il s’interroge sur le statut autonome de l’« anthropologie » développée dans les quatre grands discours qui forment ce que Martineau nomme le « quatuor de l’existence humaine », et dont l’A. ne dit mot.

Laure Verhaeghe

2.2.32. MOREAU, Roger, Naissance de l’esprit scientifique : hommage à Marin Mersenne, 1585-1648, Perros-Guirec, Anagrammes, 150 p.

2.2.33. OLIVEIRA E SILVA, Paula, « A doutrina suareziana sobre a natureza paixãoes : antecedentes medievais e prenúncios de modernidade », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 175-184.

2.2.34. PERRIN, Christophe, « Pascal, utile mais incertain selon Heidegger », Heidegger Studies 28, 2012, p. 147-168.

2.2.35. REID, Jasper, The Metaphysics of Henry More, Springer, 2012, 207 p.

2.2.36. RIEGER, Hans-Martin, « Natürliche Vernunft und Vernunft des Glaubens : Der Beitrag Blaise Pascals zu Erkenntnistheorie und Religionsphilosophie », Neue Zeitschrift für systematische Theologie und Religionsphilosophie, 2012, 54, 2, p. 147-167.

2.2.37. RIOUX-BEAULNE, Mitia, « Les enfants voient ce que leurs mères voient : l’imaginationisme de Malebranche et sa réception au XVIIIe siècle », Rivista Di Storia Della Filosofia, 2012, 67/4, p. 705-726.

2.2.38. ROUX, Sophie, « Logique et méthode au XVIIe siècle », in MEHL, Edouard (éd.), La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p., p. 21-45.

2.2.39. SHIOAKAWA, Tetsuya, Entre foi et raison : l’autorité. Etudes pascaliennes, Paris, Champion, 2012, 260 p.

2.2.40. STORRIE, Stefan Sean Gordon, « Berkeley’s apparent Cartesianism in De Motu », Archiv für Geschichte der Philosophie, 2012, 94, 3, p. 353-366.

2.2.41. TANOÜARM, Guillaume de, Parier avec Pascal, Paris, Le cerf, 212, 314 p.

2.2.42. TODD, Ryan, Pierre Bayle’s Cartesian metaphysics : rediscovering early modern philosophy, Londres, Routledge, 2009/2012, 223 p.

2.2.43. TODISCO, Orlando, « E Leibniz, non Cartesio, il padre della filosofia moderna. Rilettura francescana della modernità e della postmodernità »,Miscellanea francescana, 2012, 112, 3-4, p. 633-667.

2.2.44. TODISCO, Orlando, « Il ruolo del soggeto e il primato della volontà », Miscellanea francescana, 2012, 112/1-2, p. 7-30.

2.2.45. TOUBOUL, Patricia, Fénelon et les arts du dessin. Instruire par l’image, Paris, Vrin, 2012, 320 p.

Issu d’un travail de thèse, l’ouvrage entend démontrer que les préoccupations esthétiques ne sont pas secondaires pour Fénelon, mais qu’il donne « une théorie de l’image visuelle » dans le sillage de l’ut pictura poesis (p. 11). Il s’inscrit dans la tradition tridentine de la valorisation de l’image, préférable aux effets verbaux de l’art oratoire pour instruire en religion, à condition de rester austère et dépouillée. Le chap. I (« La notion d’image dans les Dialogues sur l’éloquence ») dégage une définition visuelle de l’éloquence : le but de l’art oratoire et de la poésie est de peindre, un grand poète fait surgir un monde d’images, sans se soucier des vers, des rimes et des effets sonores qui ne sont que des moyens accidentels. La peinture acquiert ainsi un privilège parmi les arts, « éloquence muette » qui donne à voir, comme la contemplation de la Croix du Christ se suffit à elle-même et rend vaine toute parole. Selon cette « structure invariable de l’esthétique fénelonienne » (p. 32), la force de l’image visuelle est déduite de la dépendance de l’homme déchu vis-à-vis de ses sens, mais le silence et le retranchement des effets de style, propres à l’image, permettent à celle-ci de conduire peu à peu le pécheur sensuel vers le recueillement. Une longue recension, sans doute nécessaire mais un peu fastidieuse, étudie alors les sources de cette théorie de la soumission du style à la vérité à travers les influences parisiennes (Bossuet, Fleury, Lamy, Rapin, Malebranche, dans un contexte platonicien). – Le chap. II lie pédagogie et apologétique : l’enfant comme l’infidèle ne savent pas user de la raison et de l’attention. Il faut y suppléer en sollicitant l’imagination par un recours au visuel où la vérité est plus facilement sentie que comprise. L’image contraint à voir les actions, les corps, les visages dans l’ordre de la création avec une exactitude qui en fait « la matrice de toute émotion esthétique authentique » (p. 85). Mais l’essentiel du chapitre est consacré à démontrer que Fénelon ne se contente pas de « réciter des poncifs » (comme l’ont soutenu plusieurs de ses lecteurs), mais qu’il est très au fait de toutes les doctrines. On le trouve donc engagé dans la querelle de 1670, à l’Académie, pour le dessin, contre la couleur, pour l’atticisme, contre l’asianisme, prolongeant la condamnation de la couleur par Platon et Quintilien. Dans le privilège accordé au dessin, il est même disciple d’Aristote. Au terme d’un parcours à l’érudition détaillée, l’A. conclut qu’« il apparaît donc possible de dégager les liens d’un réseau qui court de la seconde sophistique – Philostrate et Lucien – à Vigenère, puis à Loyola, à Richeome, et enfin à François de Sales pour atteindre Fénelon », bien qu’il avoue douter « que ces auteurs souscrivent à la même conception de l’éloquence » (p. 98). Suit une longue description des intermédiaires possibles entre le traité d’Alberti et Fénelon pour expliquer l’influence d’un ouvrage que celui-ci n’a peut-être pas lu. – Le chap. III (« La référence à l’esthétique et aux arts du dessin dans l’éducation ») se recentre sur Fénelon : sa pédagogie possède une double racine, anthropologique (l’enfant est plus apte à sentir et à observer qu’à raisonner) et théologique (les paroles encouragent la vanité quand les images invitent au silence, à la contemplation muette). C’est pourquoi la délectation esthétique tournée vers une image est déjà une dépossession de soi qui engage dans la direction du pur amour. Les arts du dessin (peinture, sculpture, architecture) ont surtout une fonction édifiante en montrant comment la représentation passe par le refus des effets inutiles, du caprice, de la coquetterie. Cette école du renoncement privilégie donc la peinture classique dont Poussin est, aux yeux de Fénelon, le maître. Ce chapitre se termine par une belle étude du modèle architectural selon Fénelon qui reprend les mêmes règles : le rejet du « style gothique », propre aux peuples germaniques, arabes et chinois, emblème de l’orgueil et du caprice, au profit de la simplicité, de la ligne droite et de l’absence d’ornements : nouvelle occasion d’insister sur le rôle moral d’un habitat qui n’excite pas les sens et ramène, par son austérité, à la contemplation d’un ordre. – Le dernier chap. (« Le cabinet de peinture de Fénelon ») est consacré à l’interprétation de Poussin par Fénelon, en particulier Paysage avec les funérailles de Phocion et Paysage avec un homme tué par un serpent. Au terme d’une longue recension qui passe en revue toutes les interprétations dont ces tableaux ont été l’objet, la thèse de Fénelon est reconstituée par l’A. L’importance donnée au paysage oppose l’aveuglement, les passions, l’insouciance des hommes, au premier plan, et le signe de la présence divine dans une nature dépouillée (« dans le fond tout est paisible »). La beauté du paysage en fait plus que le décor d’une action : c’est la célébration de la création dépouillée de l’artifice et des pompes de l’amour-propre. La fonction édifiante reste décisive, dans l’anéantissement de soi au profit de l’amour de Dieu. Ainsi, cet ouvrage veut montrer que Fénelon « ne prétend surtout pas à l’originalité, mais se réclame tout simplement de la Tradition de l’Église » (p. 267). Sans doute est-ce cette absence d’originalité qui a obligé l’A. à diluer parfois la pensée de Fénelon au milieu de tant de pages érudites consacrées aux sources et aux influences de sa doctrine.

Pascal Dumont

2.2.46. TRÉMOLIÈRES, François, « Malebranche et la théologie au prisme des études malebranchistes de l’entre-deux guerres », in GAY, Jean-Pascal & STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les « métamorphose de la théologie ». Théologie, littérature, discours religieux aux XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p., p. 275-294.

2.2.47. VILLAR, Alicia, Pascal, Madrid, Gredos, 2012, 1048 p. [en espagnol].

2.2.48. WALSH, Julie & LENNON, Thomas M., « Malebranche, the Quietists, and Freedom », British Journal for the History of Philosophy, 2012, 20/1, p. 69-108.

2.2.49. WIEL, Véronique, « Écrire comme n’écrivant pas… ou de l’usage de la littérature chez Malebranche », Dix-septième siècle, 2012, 255, 2, p. 205-214.

3. Études particulières

3.1. DESCARTES

3.1.1. ABITEBOUL, Olivier, « La certitude : à propos du doute chez Descartes », in ABITEBOUL, Maurice (éd.), Mythes et croyance au théâtre, Théâtre du monde, cahier n°22, 2012, 473 p., p. 383-386.

3.1.2. ALANEN, Lilli, « The role of will in Descartes’ account of judgment », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 176-199.

3.1.3. ALEXANDRESCU, Vlad, « What Someone May Have Whispered in Elisabeth’s Ear », in GARBER, Daniel & RUTHERFORD, Donald (éd.), Oxford Studies in Early Modern Philosophy, vol VI, Oxford, Oxford University Press, 2012, 400 p., chap. 1, p. 1-28

3.1.4. ARBIB Dan, 2012, « Le moi cartésien comme troisième livre. Note sur Montaigne et la première partie du Discours de la Méthode », Revue de métaphysique et de morale, 2012, 74/2, p. 161-180.

L’A. entend, avec cette note, faire avancer l’étude du rapport de D. à Montaigne quant à l’émergence du « moi cartésien » d’une part et, d’autre part, contribuer, plus généralement, au débat actuel (2007-2010) sur l’émergence de la subjectivité (cf. les livres d’O. Boulnois, A. de Libera, G. Aubry & F. Ildefonse, V. Carraud). L’A. montre d’abord que le Discours de la méthode reprend la distinction entre liber scripturæ et liber naturæ. En effet, D. dit avoir parcouru « tous les livres » à La Flèche (une des meilleures écoles existantes), mais « l’univers scolaire est un scandale » (H. Gouhier) : il faut donc aller plus loin. La considération du « grand livre du monde » permet l’épuration de la raison eu égard à la coutume, et une critique empirique du jugement. Le monde n’est pourtant pas le lieu où s’atteint la vérité, car la pratique des hommes est similaire (et non seulement complémentaire comme pour Montaigne) à celles des livres : elle en a aussi les limites. D. dépasse Montaigne (et Augustin) en disqualifiant les deux premiers livres et en assignant un autre lieu à son étude : « en moi-même », dans une sorte de liber mentis. Le concept d’« essai » de Montaigne se trouve alors repris et dépassé par l’« épreuve de soi-même » de D. (p. 175-177). L’intérêt premier de l’article réside dans ces développements sur le liber mentis et l’épreuve de soi-même : le moi qui s’y découvre alors assumera une fonction transcendantale.

Michaël Devaux

3.1.5. ARIEW, Roger, « Descartes and His Critics on Matter and Form : Atomism and Individuation », in Manning, Gideon (éd.), Mater and Form in Early Modern Science and Philosophy, Leiden, Brill, x-248 p., p. 187-201.

3.1.6. ARIEW, Roger, « Descartes and Leibniz as Readers of Suarez : Theory of Distinctions and Principle of Individuation », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 38-56.

3.1.7. BORIC, Marijana, « Getaldic, Descartes and Analytical Geometry », Prilozi za Istrazivanje Hrvatske Filozofske Bastine, 76, 38/2, 2012, p. 167-196. [en croate].

3.1.8. BRANDT BOLTON, Martha, « Thinking : the nature of Descartes’mental substance », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 64-81.

3.1.9. BRASSFIELD, Shoshana, « Never let the Passions be Your Guide : Descartes and the Rôle of the Passions », British Journal for the History of Philosophy, 20, 3, 2012, p. 459-477.

L’A. s’oppose à l’interprétation selon laquelle le rôle des passions de l’âme serait selon D. de nous permettre de distinguer ce qui est bon de ce qui nous est nuisible et par là de nous guider dans nos actions. En réalité, le rôle des passions n’est pas de nous faire connaître quoi que ce soit, mais de nous incliner dans nos décisions ; c’est pourquoi notre bonheur suppose que nous les maîtrisions plutôt que nous ne nous laissions guider par elles. On ne peut que savoir gré à l’A. d’avoir rappelé ces positions.

Gilles Olivo

3.1.10. BROWN, Deborah J. 2012, « Cartesian Functional Analysis », Australasian Journal of Philosophy, 2012, 90/1, p. 75-92.

3.1.11. BROWN, Deborah, « Descartes and content skepticism », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 25-42.

3.1.12. CARRIERO, John, « Sensation and knowledge of body in Descartes’Méditations », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 103-126.

3.1.13. CIMAKASKY Joseph & POLANSKY Ronald, « Descartes’ ‘Provisionnal Morality’ », Pacific philosophical quarterly, 2012, 93/3, p. 353-372.

3.1.14. CLAVELIN, Maurice, « Galilée, Descartes, et la nouvelle vision du monde », Focus : Cosmology and Motion, 2012, p. 3-28.

Comme le souligne l’A., la science moderne n’est pas née d’un projet commun et autonome, dont l’élargissement progressif aurait conduit au système de Newton, mais de projets différents. Mais les principaux artisans de l’émergence de la nouvelle science (Kepler, Galilée, D.) visaient tous le remplacement de l’ancienne philosophie par des théories pourvues d’une nouvelle intelligibilité fondée sur les mathématiques. C’est dans cette perspective que s’inscrit la présente étude : certes, D. et Galilée s’opposent sur le caractère de la physique mathématique qu’ils entendent développer et, principalement, sur la science du mouvement, mais la question de leurs rapports reste posée touchant un autre aspect de leur œuvre, à savoir leur vision du monde. L’A. souligne que la cosmologie cartésienne prolonge et renforce, dans son contexte propre, certaines analyses de Galilée : le monde que D. construisait « prolongeait et développait, à son insu et sur bien des points, celui dont Galilée avait posé les bases » (p. 28). Deux éléments sont examinés de près : le rôle du principe de conservation du mouvement et la question des taches solaires. Concernant le premier, là où Galilée ne proposait pas de véritable explication du mouvement des planètes fondée sur ce principe, D. propose, lui, une hypothèse cohérente : il avance une cause mécanique de la stabilité des orbites planétaires et décompose les trajectoires circulaires en deux éléments (tendance rectiligne à la conservation du mouvement acquis et mouvement opposé à cette tendance). Concernant les taches solaires : là où Galilée avance des analogies pour rendre compte de leur nature (une comparaison avec les nuages de la Terre ou avec les fumées noires dégagées par certains bitumes en combustion), D. avance une explication mécanique fondée sur sa théorie des éléments et, plus particulièrement, sur son hypothèse d’une circulation du premier élément (le plus fluide) à travers les grands tourbillons qui composent les différents systèmes planétaires. En outre, ce mécanisme explicatif des taches sert à rendre compte d’autres phénomènes : les novae et les comètes. L’A. souligne que D., dans son explication des comètes, affirme que certains tourbillons peuvent être détruits et donner lieu à une errance de certaines étoiles ; ainsi, après Galilée, qui avait introduit la mutabilité dans le Ciel, Descartes introduit l’instabilité. Les deux auteurs poursuivent donc un but commun en matière de cosmologie : construire une théorie unifiée, où tous les corps sont soumis aux mêmes lois, aux mêmes processus physiques de composition et de décomposition, la cosmologie cartésienne présentant toutefois une puissance d’explication nettement supérieure à celle de Galilée. Pour répondre aux objections théologiques avancées contre l’héliocentrisme (le recours aux textes sacrés et l’argument de la toute puissance divine), Galilée s’appuie sur la capacité de l’intellect humain aidé par les sens à connaître la vérité, alors que D. donne une réponse proprement métaphysique à l’argument des théologiens. Comment savoir si les hypothèses qu’il avance (la théorie des éléments et des tourbillons), introduites pour expliquer le monde et faire le lien entre les lois certaines de la nature et les phénomènes observés, sont correctes ? Pour D., la cohérence de son explication d’ensemble des phénomènes, l’extension du champ de sa théorie, le petit nombre de principes sur lesquels elle repose et la certitude métaphysique dont sont pourvus ces premiers principes, garantissent une quasi-certitude de sa philosophie naturelle.

La contribution de M. Clavelin est décisive à deux niveaux : d’abord, en raison des analyses éclairantes qu’il propose concernant la complémentarité de D. et de Galilée sur des points essentiels de leur cosmologie – là où la comparaison courante consiste à ne souligner que leur opposition touchant la science du mouvement et la perspective générale de la démarche philosophique ; ensuite, parce qu’il trace le projet méthodique de tout un champ de recherche, à savoir cerner l’identité de fonction de certains principes ou de certains concepts, au sein d’œuvres philosophiques pourtant très différentes du point de vue de leurs orientations et de leur projet. Cette approche permet d’élaborer une histoire des sciences axée sur la « construction » progressive de la physique, sans verser dans le positivisme.

Philippe Boulier

3.1.15. COTTINGHAM, John, « Skeptical Detachment or Loving Submission to the Good? Reason, Faith, and the Passions in Descartes », in COAKLEY, Sarah (éd.), Faith, Rationality and the Passions, Wiley Blackwell, 2012, 270 p., p. 107-116.

3.1.16. D’IPPOLITO, Bianca Maria, L’invisibile potenza del sentire. Descartes, Leibniz, Milan, F. Angeli, 2012.

3.1.17. DETLEFSEN, Karen, « Teleologie and natures in Descartes’ Sixth Méditation », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 153-175

3.1.18. DONATELLI, Marisa Carneiro de Oliveira Franco, « Descartes. Artes mecânicas e filosofia », Ágora Filosófica, v. 1, 2012, p. 115-133. [en portugais].

3.1.19. EHRSAM, Raphaël, « Représentation des sourds et muets et fonctions de la parole de Descartes à Kant », Archives de Philosophie, 2012, 75/4, p. 643-667.

3.1.20. FAYE, Emmanuel, « Descartes e a consciência em La recherche de la vérité par la lumière naturelle », Educação e filosofia, 2012, 26, 51, p. 145-162 [en portugais].

3.1.21. GAUDEMARD Lynda, « Les ‘marques d’envie’ : métaphysique et embryologie chez Descartes », Early Science and Medicine, 2012, 17/3, p. 309-338.

L’enjeu est intéressant, puisqu’il s’agit d’examiner l’interaction entre médecine et métaphysique dans la philosophie de D., à partir de l’étude des angiomes ou taches de naissance, traditionnellement appelés « marques d’envie ». Ces marques d’envie sont, selon l’A., « pour D. et ses contemporains, l’occasion d’interroger de façon générale la nature de la relation entre le corps et l’esprit via cette question particulière : comment les idées de la mère peuvent-elles influer sur la formation du corps du fœtus » ? (p. 311). L’A. veut montrer, contre l’article de J. H. Smith « The Problem of Heredity in Mechanist Embryology » (in ID. (éd.), The Problem of Animal Generation in Early Modern Philosophy, New York, 2006, p. 80-102), que « l’imagination corporelle ne suffit pas pour rendre compte du phénomène des marques d’envie » (p. 314-323). S’appuyant sur l’analyse de R. Wilkin, « Essaying the Mechanical Hypothesis : Descartes, La Forge and Malebranche on the Formation of Birthmarks » (Early Science and Medicine, 13, 2008, p. 538-39), l’A. souligne que « sans passion partagée entre la mère et le fœtus, les marques d’envie ne peuvent se former » (p. 320). L’argument est que, selon D., ces marques « ont pour cause dernière ou prochaine la sympathie, et pour cause principale et lointaine l’imagination » (p. 326-327, 331, 334). La sympathie est étudiée (p. 326-330) d’après les Écrits physiologiques et médicaux de D. édités par V. Aucante (Paris, 2000, BC XXXVII, 3.1.27), et l’essentiel de l’article (p. 314-323, p. 331-334) concerne la conception cartésienne de l’imagination, à la fois « partie du cerveau » et « mode de pensée » (p. 316, 320-321, 332), puisque c’est l’imagination qui « met en œuvre la sympathie par l’influence exercée sur le battement cardiaque » (p. 334).

L’article reste programmatique, comme en témoigne le point d’interrogation du titre de la dernière partie : « Les marques d’envie : une solution au problème de l’union substantielle ? » (p. 334). Le corpus de l’étude est trop étroit du point de vue méthodologique, historique, scientifique et philosophique. Plusieurs sources primaires et secondaires sont laissées de côté, notamment sur l’utilisation de la notion de « force de l’imagination, vi imaginationis » dans la physiologie, à laquelle D. se réfère (AT XI, 642, 643). Car D. n’ignore pas l’arrière-plan médico-philosophico-théologique de la réflexion sur la ou les forces de l’imagination en liaison avec le développement embryologique : Fienus (Feyens) et son traité De viribus imaginationis (Louvain, 1608, Leyde, 1635) ; Forestus (van Foreest) et les éditions de ses Observationes. Ce dernier est d’ailleurs cité dans la lettre à Mersenne du 30 juillet 1640 dont un extrait est repris (p. 330). Le recours à ces textes aurait permis de faire preuve de nouveauté, plus que dans la longue n. 13, par exemple, sur la différenciation sexuelle, thème peu original après D. Des Chene (Spirits and Clocks, Ithaca/Londres, 2001 ; BC XXXII, 3.1.69), J. Roger (Les sciences de la vie dans la pensée française du XVIIIe siècle. La génération des animaux de D. à l’Encyclopédie, Paris, 1963) et P. Hoffmann (La femme dans la pensée des Lumières, Strasbourg, 1977). La thèse annoncée trouve peu d’éléments importants de confirmation, parce que des points fondamentaux de la physiologie et de l’embryologie cartésiennes ne sont pas vus. La traduction de l’extrait des Primae cogitationes circa generationem animalium, en AT XI, 518 (p. 329, p. 331-334) est inexacte, le texte disant : « est tamen formatrix », ce qui souligne le contraste entre les membres extérieurs (membrorum exteriorum) régulés par la mère, et le cœur du fœtus qui ne l’est pas ; c’est la mère – et non la sympathie, comme redit p. 331 – qui est formatrix membrorum. Par ailleurs, la « mystérieuse ‘voie artérielle’» (p. 317) est liée aux recherches anatomiques et embryologiques de D. et en particulier à son intérêt pour le cordon ombilical, sa veine et ses deux artères, (cf. Excerpta anatomica, AT XI, 589 ; Primae cogitationes, AT XI, 511). Artères ombilicales qui ne tempèrent pas le mouvement du cœur du fœtus (AT XI, 518), mouvement qui était alors une question disputée et qui chez D. est lié à la vie même du fœtus (AT XI, 506, 509-510). Certes, il s’agit là d’une embryologie plus mécaniste que métaphysique, et d’une embryologie que D. dégage des louanges adressées au corps humain. Ce point n’est pas indifférent à la controverse avec Regius, rapidement citée (dans le résumé, puis p. 334), et qu’il fallait aussi replacer dans son contexte : celui du rôle attribué au hasard dans les traités médicaux, contrepartie aux louanges adressées au corps humain et associées au thème banal des louanges envers la providence divine et/ou celle de la Nature, qui ne font rien en vain et qui n’agissent pas au hasard. La notion d’union « substantielle », (p. 334-336) n’est pas commentée ; la lettre du 20 février 1639 (p. 311), évoquant les lectures et les expériences anatomiques auxquelles D. se consacre depuis « onze ans », renvoie à 1629, D. comptant généralement les années initiale et finale. L’A. mentionne une seule fois la Description du corps humain (p. 334), mais avec un renvoi à L’Homme. Quelques coquilles demeurent, dont deux p. 335 altèrent le sens de la deuxième phrase.

Annie Bitbol-Hespériès

3.1.22. GIUSTI, Enrico, « Le leggi dell’urto dei corpi duri nei « Principia » di Descartes », Giornale critico della filosofia italiana, 2012, 8, 2 p. 266-284.

3.1.23. GÓMEZ ALONSO, Modesto M., « Justificación cognitiva de las sensaciones en Meditación sexta », Dókos. Revista Filosófica, 9-10, 2012, p. 7-22 [en espagnol].

3.1.24. GRIGOROPOULOU, Vasiliki, « Descartes’s Physics vs. Fear of Death ? An Endless Translatio of Thoughts and Bodies », in SGARBI, Marco (éd.), Translatio Studiorum. Ancient, Medieval and Modern Bearers of Intellectual History, Leiden, Brill, 2012, xiv-263 p., p. 17-196.

3.1.25 GUENANCIA, Pierre, « La question du libre arbitre : Descartes ou Hobbes », in ZARKA, Yves Charles (éd.), Liberté et nécessité chez Hobbes et ses contemporains. Descartes, Cudworth, Spinoza, Leibniz, Paris, Vrin, 2012, 134 p.

3.1.26. HATFIELD, Gary, « Descartes on sensory representation, objective reality, and material falsity », in DETLEFSEN, Karen (éd.),Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 127-150.

3.1.27. HILL (Benjamin) & LAGERLUND (Henrik) (éd.), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, UP, 2012, 320 p.

Ce recueil d’essais a pour cible polémique le « relative neglect » dont aurait pâti l’œuvre de Suárez après la première moitié du XVIIe siècle. Parmi les lignes d’enquête permettant d’insister sur l’importance de cet auteur, notons celle de son influence sur quelques-uns des principaux philosophes modernes. Comme le souligne Hill dans son Introduction, à côté de l’indubitable influence exercée par les Metaphysicae disputationes sur la deuxième et troisième scolastique, celle de Suárez sur la modernité demeura moins évidente à l’exception des cas de Leibniz et D. Toutefois, Hill prend aussi acte de la prudence manifestée sur ce point dans l’unique contribution consacrée (partiellement) à D. dans le recueil, à savoir l’article de R. Ariew, « Descartes and Leibniz as Readers of Suárez : theory of Distinctions and Principle of Individuation » (p. 38-53). Dans cette fine contribution, Ariew soutient que, s’il est plausible que D. ait été un lecteur des Metaphysicae disputationes, une telle influence a dû s’émousser après la rédaction des Meditationes ; D., formé à la culture scolastique à La Flèche, en aurait abandonné l’étude entre 1620 et 1640, pour la reprendre seulement après 1640, dans la période qui va de la composition des Responsiones à la rédaction des Principia philosophiae. Plus conformes aux déclarations programmatiques de l’éditeur se trouvent en revanche les autres contributions, toutes visant à établir une ligne de continuité entre Suárez et D. Ainsi, J. Secada (« Suárez on Continuous Quantity », p. 75-86) relève que la discussion cartésienne de la quantité continue se situe plus dans un rapport d’éclaircissement et de développement de son traitement suárezien que de rupture et de révolution (p. 84-86) ; D. Des Chene (« Suárez on Propinquity and the Efficient Cause », p. 89-100) montre la dissolution du modèle suárezien de l’action à distance dans la réduction cartésienne de l’interaction causale au contact immédiat ; H. Hattab (« Suárez’s Last Stand for the Substantial Form », p. 101-118) identifie un axe qui va de Suárez à D. dans la transformation des formes matérielles de substantielles en accidentelles et dans l’éclipse de la causalité formelle au profit de celle matérielle et efficiente (p. 101-118) ; enfin, J. B. South (« Suárez, Immortality, and the Soul’s Dependence on the Body », p. 121-136) relève une analogie avec D. dans la thèse suárezienne de l’impossibilité pour un procès cognitif matériel de produire un résultat cognitif spirituel et vice versa (p. 135-136).

On pourrait émettre quelques réserves sur l’affirmation selon laquelle l’attention prêtée aux rapports entre D. et Suárez est chose récente (p. 18), puisque cet intérêt date au moins du début du XXe siècle, grâce à La liberté chez Descartes et la Théologie (Paris, Vrin, 1913) et à l’Index scolastico-cartésien (ibid.) d’Ét. Gilson, immédiatement suivis par les Thèses cartésiennes et thèses thomistes (Paris, Desclée de Brouwer, 1932) de P. Garin, absents de la bibliographie de l’ouvrage (bibliographie par ailleurs excellente, puisque toutes éditions des œuvres de Suárez ont été indiquées), tout comme le dense article de N. J. Wells sur « Descartes on Distinction » (in F. J. Adelmann, F. J., The Quest for the Absolute, Chestnut Hill, MA ; La Haye, Boston College ; Nijhoff, Studies in Philosophy, 1966, p. 104-134). De plus, la tension partielle entre la ligne d’Ariew et celle du volume dans sa généralité soulève à nouveau le problème effectif de l’influence éventuelle de la scolastique sur D., qui doit sans nul doute préalablement passer par une rigoureuse séparation entre les plans philologique et conceptuel. C’est donc à juste titre que South distingue le niveau des analogies conceptuelles et celui de l’influence historique effective. Il faut en revanche relever que les mêmes analogies conceptuelles devraient, en contexte interprétatif (qui est indubitablement celui dans lequel se meuvent ces essais), être toujours attentivement pondérées : pour en rester au cas de South, ce qu’il définit comme le « cognitive process dualism » est rapproché de la pensée de D. sur la seule base de deux passages sur l’innéisme des idées sensibles des Notae in programma quoddam, dont la conciliation avec d’autres lieux du corpus cartésien est objet de débat parmi les spécialistes (songeons aux pages consacrées à cette question dans le Descartes selon l’ordre des raisons, t. II, de M. Gueroult). Enfin, si une plus grande attention à l’égard de Suárez est sans nul doute souhaitable, on peut aussi légitimement se demander si, en un tel approfondissement, on ne devrait pas éviter certains excès, comme qualifier Suárez de « one of the most important and influential philosophers in all of Europe » (p. 1), affirmation que l’on ne peut partager qu’en la limitant à la sphère de la culture institutionnalisée ; ou comme quand, soulignant l’absence d’entrée consacrée au théologien et philosophe espagnol dans la Stanford Encyclopedia of Philosophy, on place sans hésitation parmi les « entries […] decidedly less interesting, important, and influential » (p. 3) même Giambattista Vico.

Igor Agostini

3.1.28. IMAI, Yusuke, « Descartes ni okeru kubetsu no giron : “Tetsugakugenri” ni okeru sansyu no kubetsu [Les trois sortes de distinctions dans les Principes de Descartes] », Philosophical studies, 31, p. 127-141 [en japonais].

3.1.29. JAUME, Andrés L., « La teoría de las pasiones en Tomás de Aquino y Descartes », Estudios Filosoficos, 61, 178, 2012, 513-526 [en espagnol].

3.1.30. LENNON, Thomas M. & HICKSON, Michael W., « The skepticism of the First Meditation », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 9-24 .

3.1.31. LERCHNER, Thorsten, « Analyse und Synthese: Descartes’ ‘Meditationes’: Über die zwei Gottesbeweise, Gewissheit und Methode in Descartes’ ‘Meditationes de prima philosophia’ », Theologie und Philosophie : Vierteljahresschrift, 87, 4, 2012, 499-520.

3.1.32. LOMBA FALCÓN, Pedro, « ‘Deus deceptor’: En torno a los conceptos de potencia, trascendencia y racionalidad en la metafísica de Descartes », Logos. Anales del Seminario de Metafisica, 45, 2012, p. 65-93. [en espagnol].

3.1.33. MAMEŁKA (Tomasz), « Rola uczuć w życiu osobowym człowieka w ujęciu św. Tomasza z Akwinu i Kartezjusza : analiza porównawacza [Le rôle des sentiments dans la vie personnelle de l’homme selon saint Thomas d’Aquin et Descartes – l’analyse comparative] », Studia Philosophiae Christianae 48, 2012, p. 103-135 [en polonais].

3.1.34. MANNING, Gideon, « Analogy and Falsification in Descartes’ Physics », Studies in History and Philosophy of Science, 43/2, 2012, p. 402-411.

L’A. propose de la théorie et de l’usage des analogies dans la physique de D. une analyse relevant à la fois de la philosophie des sciences et de l’histoire de la philosophie et des sciences. Cette contribution très précise et très rigoureuse, aussi bien philosophiquement qu’historiquement, se signale par deux apports majeurs : (1) Le premier réside dans la façon dont il articule la notion d’hypothèse à celle d’analogie. L’A. distingue à juste titre deux types d’hypothèses : celles qui peuvent avoir une justification métaphysique qui n’est cependant pas toujours explicitée (ce qui fait qu’elles conservent un statut épistémique précisément hypothétique) et celles qui ne sauraient recevoir une telle justification. L’identification de la matière à l’étendue peut relever de la première catégorie puisque, dans Le Monde, D. n’en fournit pas de justification métaphysique, mais offre plutôt des arguments a posteriori en sa faveur et insiste sur son efficacité explicative (AT XI 26, 2-8). En revanche, une hypothèse consistant à considérer la création du monde à partir d’un état de proportion et d’ordre dans les Principia philosophiae (AT VIII-1 103, 2), plutôt qu’à partir de parties de matière toutes diverses comme dans Le Monde (AT XI 34, 5-26), semble relever du deuxième type. La démarche de l’A. présente donc le mérite de nous rendre sensibles aux contextes d’énonciation de telle ou telle proposition de la philosophie naturelle cartésienne, alors qu’on a trop longtemps simplement mis sur le même plan, du fait de leurs similarités certes avérées, des textes tels que Le Monde ou les Principia. À partir de là, l’A. montre comment une hypothèse de premier type permet de forger une analogie qui elle-même débouchera sur une hypothèse de deuxième type. (2) Le second apport consiste à réarticuler l’usage cartésien de l’analogie à la fonction que revêt l’expérience dans la constitution de la physique cartésienne. À rebours des interprétations, nombreuses depuis Christiaan Huygens, qui reléguaient la physique cartésienne dans le domaine de la fiction, précisément parce qu’elle userait d’analogies fantaisistes au lieu de s’appuyer sur l’expérience, l’analyse convaincante menée ici montre quel lien effectif et fondé en métaphysique existe entre la constitution d’analogies et le recours à l’expérience dans la physique cartésienne. – On pourrait toutefois discuter la façon dont l’A. use de la distinction, certes parfaitement légitime, entre une fonction heuristique et une fonction pédagogique de l’analogie. En effet, il n’est pas certain que l’on puisse déterminer que telle analogie (par exemple celle faisant concevoir la propriété de propagation instantanée de la lumière à partir du bâton d’aveugle dans la Dioptrique, AT VI 83, 28-86, 20) possède vraiment une fonction heuristique plutôt que pédagogique dans la physique de D. Mais là-dessus, l’A. a parfaitement raison d’insister sur l’ambiguïté de D. lui-même.

Delphine Bellis

3.1.35. MEHL, Edouard, « Théorie physique et optique des comètes de Kepler à Descartes », in GRANADA, Miguel A. (éd.), Novas y Cometas entre 1572 y 1618. Revolucion cosmologica y renovacion politica y religiosa, Universitat de Barcelona, Publicacions i Edicions, p. 255-274.

3.1.36. MILIDRAG (Predrag), „Objektivna stvarnost, njeni stupnjevi i formalno bivstvovanje (esse) kod Dekarta [La réalité objective, ses degrés et être formel chez Descartes]“, Filozofski godišnjak 25, 2012, p. 113-132 [en serbe].

3.1.37. MILIDRAG (Predrag), « Katerus i Dekart o idejama, uzrokovanju i večnim istinama [Caterus et Descartes sur idées, causalité et vérités éternelles] »,Theoria 55, 2012, p. 45-69. Disponible en ligne http://www.doiserbia.nb.rs/img/doi/0351-2274/2012/0351-22741201045M.pdf [en serbe].

3.1.38. MORI, Gianluca, « Hobbes, Descartes, and Ideas: A Secret Debate », Journal of the History of Philosophy, 2012, 50/2, p. 197-212.

L’A. avance ici la thèse selon laquelle l’auteur anonyme de la lettre à Mersenne pour D. du 19 mai 1641 (AT III 375-377, CCXLI ; éd. Belgioioso 314, p. 1462-1465 ; Clerselier III 627-628) serait Thomas Hobbes. Les arguments sont pour l’essentiel des comparaisons textuelles et conceptuelles établies entre les objections de l’anonyme, les Objectiones IIIae et les ouvrages de Hobbes. Rappelons-en les principales : (1) l’identité de la problématique entre la lettre de l’anonyme et les Objectiones IIIae : la nécessité d’une explication plus claire (« clarius mihi explicatum vellem », AT III 375, B 314, p. 1462) et meilleure (« melius explicare », AT VII 180, B Op I 920) de la notion d’idée ; (2) la thèse qu’une idée-image ne peut pas représenter Dieu et, surtout, la raison qui en est à la base (l’infinité et l’incompréhensibilité de Dieu) ; (3) le refus de la distinction entre deux idées du Soleil, une sensible et une intellectuelle ; (4) la critique de la distinction (attribuée à D.) entre idées sensibles et intellectuelles dans les termes d’une distinction entre noms et propositions ; (5) la réduction de l’idée de Dieu à la proposition « Dieu existe » ; (6) la pétition de principe subséquente dans la démonstration cartésienne a priori de l’existence de Dieu (et de l’immortalité de l’âme). – Ces comparaisons sont précises et fortes. Certes, un certain nombre d’objections de l’anonyme ne sont pas propres à Hobbes, et l’A. lui-même le souligne au sujet de l’incompréhensibilité de l’infini ; on aurait même pu ajouter les cas de la négation des deux idées du soleil et l’accusation de pétition de principe (thèses qui se retrouvent dans la Disquisitio metaphysica de Gassendi). Reste qu’au moins sur deux points les comparaisons établies par l’A. semblent désigner Hobbes de façon plus univoque : (1) le recours à l’exemple de 1’idea pedalis, qui se retrouve, presque à la lettre, dans le Tractatus opticus de 1644 et dans le De corpore ; (2) la mobilisation d’une prémisse qui constituait précisément la contre-objection de D. à Hobbes : le fait d’appeler idées, comme D. le prétend, les connaissances intellectuelles.

Mori établit, ou du moins éclaircit, l’horizon conceptuel des objections de l’interlocuteur anonyme comme personne ne l’avait fait avant lui. Quoiqu’il manque une preuve philologique, la seule qui puisse décider de façon incontestable du profil intellectuel et de l’identité historique de l’anonyme, il convient de ne pas méconnaître la légitimité et l’utilité, pour la formulation d’hypothèses d’identification, de la méthode des comparaisons textuelles bien fondées. C’est le cas ici, comme d’ailleurs dans l’article où S. Landucci proposait l’identification entre l’Hyperaspistes et Mersenne (« Contributi di filologia cartesiana », Rivista di storia della filosofia, 56, 2001, 1, p. 5-23).

Igor Agostini

3.1.39. MUZZULINI, Daniel, « Descartes’ Töne -Newtons Farben », in BALDASSARRE, Antonio (éd.), Musik-Raum-Akkord-Bild, Festschrift zum 65. Geburtstag von Dorothea Baumann, Peter Lang, Bern, 2012, p. 691–706.

3.1.40. NELSON, Alan, « Argument and Persuasion in Descartes’ ‘Meditations’ », Mind. A Quarterly Review of Philosophy, 121, 484, 2012, p. 1056-1059.

3.1.41. NEU, Jerome, On loving our enemis, Essays in Moral Psychology, Oxford, OUP, 2012, 272 p., chap. 7, « Descartes’Dreams », p. 121-128.

3.1.42. NEWMARK, Catherine, « …Le plus de douceur en cette vie… », in EBBERSMEYER, Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 270-290.

3.1.43. OAI, Takaharu « Descartes no ongakuron ni okeru kyowaon no ‘kanzensei’ to kai : ontei ni taisuru suugakuteki kitei to kankakuteki handan no soukansei wo megutte » [‘Perfection’ et agrément des consonances dans la théorie musicale de Descartes : sur la relation entre la réglementation mathématique et le jugement des sentiments], Revue de philosophie Française, 16, 2012, p. 1-39 [en japonais].

3.1.44. OLIVEIRA, Érico Andrade Marques, « O papel da abstração na instanciação da álgebra nas Regulae ad Directionem Ingennii », Analytica, 2012, v. 15, p. 145-172. [en portugais].

3.1.45. OLIVEIRA, Érico Andrade Marques, « Pragmatismo e o caráter abstrato do objeto matemático nas Regulae ad Directionem Ingenii », Cadernos de História e Filosofia da Ciência, 2012, v. 19, p. 98-114 [en portugais].

3.1.46. OTAIZA, Mauricio, « ‘L’indéfini’ y la primera prueba cartesiana de la existencia de Dios », Anales del Seminario de Historia de la Filosofia, 29, 2, p. 527-559. [en espagnol].

3.1.47. PATTERSON, Sarah, « Doubt and Human Nature in Descartes’s Méditations », Royal Institute of Philosophy Supplement, 2012, 70, p. 189-217.

3.1.48. PUSKARIC, Ksenija, « Cartesian Idea of God As the Infinite », Filozofia, 2012, 67/4, p. 282-290.

3.1.49. ROCHA, Ethel Meneze, « Infinitude da Vontade nos Homens e em Deus segundo Descartes », Analytica, v. 15, 2015, p. 125-144 [en portugais].

3.1.50. RORTY, Amélie, «The functional Logic of Cartesian Passions », in EBBERSMEYER, Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 3-18.

3.1.51. SCHUSTER, John A., « Physico-mathematics and the search for causes in Descartes’ optics – 1619-1637 », Synthese, 2012, 185, 3, p. 467-499.

L’A. revient ici à l’idée selon laquelle l’approche physico-mathématique adoptée par D. dans ses premiers travaux scientifiques vise à découvrir, à partir d’un traitement mathématique des phénomènes, leurs causes mécaniques corpusculaires, par un processus de « physicalisation » (p. 470) des disciplines appartenant traditionnellement aux mathématiques mixtes. Il reprend également l’idée que cette approche débouchera sur la conception cartésienne du mouvement corpusculaire et, surtout, de la notion de tendance au mouvement dans la physique ultérieure du philosophe. Il s’agit là d’une interprétation forte et originale qui consiste plus en une reconstruction interprétative des premières recherches de D. en physique à partir des élaborations postérieures du Monde et de la Dioptrique qu’en une lecture précisément étayée par des éléments textuels associant les prémices de la physique corpusculaire (qui font assez largement défaut en ce qui concerne les premiers travaux en optique ou sur la chute des corps) et la physico-mathématique dans son ensemble.

La plupart des éléments composant cet article ne sont pas nouveaux : une section (p. 471-476) reprend en partie un article co-écrit avec S. Gaukroger sur le paradoxe hydrostatique (« The Hydrostatic Paradox and the Origins of Cartesian Dynamics », Studies in History and Philosophy of Science, 2002, 33, p. 535-572) ; l’interprétation d’un fragment de 1620 dans la perspective d’une lecture de Kepler par D. (p. 476-481) et du modèle de la balle de la Dioptrique (p. 484-490) ainsi que les éléments présentés au sujet de la découverte de la loi de la réfraction par la cosécante et l’analyse de la lettre de Mydorge à Mersenne que l’A. date de 1626/1627 (p. 491-497) avaient été déjà assez largement exposés dans « Descartes Opticien. The Construction of the Law of Refraction and the Manufacture of its Physical Rationales, 1618-1629 » (in S. Gaukroger, J. Schuster & J. Sutton (éd.), Descartes’ Natural Philosophy, Londres & New-York, 2000, p. 258-312, cf. BC XXXI, 3.1.8). Mais les analyses reprises ici constituent une importante contribution à l’évaluation de la portée épistémologique des travaux de D. en optique. Loin de cantonner cette discipline à une pure technicité scientifique, l’A. montre qu’elle oriente D. vers un projet de visualisation des causes à l’œuvre dans la nature à partir du traitement de ces problèmes par des représentations diagrammatiques. On formulera cependant une réserve quant aux arguments, davantage évoqués qu’exposés, en faveur de la datation de la lettre de Mydorge à Mersenne (cf. Correspondance de Mersenne, I, Paris, 1932, p. 404-414) : l’édition de cette lettre par C. de Waard présentait un argument pour la dater de 1631, à savoir la mention du Traité des coniques de Mydorge publié seulement en 1631. Schuster ne fait aucun sort à cette mention qui tendrait pourtant à suggérer que le contenu de ce texte ne peut être de beaucoup antérieur à 1631.

Delphine Bellis

3.1.52. SECADA, Jorge, « God and meditation in Descartes’ Méditations on First Philosophy », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 200-225.

3.1.53. SHAPIRO, Lionel, « Objective being and ‘Ofness’ in Descartes », Philosophy and Phenomenological Research, 84, 2, 2012, p. 378-418.

L’A. reprend ici un dossier qui a connu, surtout aux États-Unis, un succès considérable : le problème de la fausseté matérielle, mais en cherchant à le connecter de manière originale avec la problématique de la détermination de la fonction de la réalité objective à l’intérieur du système cartésien. L’enjeu est alors de déterminer la raison pour laquelle D. aurait introduit la notion d’être objectif au cœur de son système. L’enquête est conduite selon l’usage de la littérature critique américaine : une analyse précise des arguments, parfois indépendante d’une interprétation authentiquement historique, produit une explication générale fondée sur des modèles théoriques bien définis mais parfois rigides. L’idée proposée est que l’introduction de la notion d’être objectif par D. ne serait pas due, comme le veut l’interprétation classique, à l’exigence d’expliquer l’individuation des idées (le fait que chaque idée est l’idée de quelque chose et d’une chose déterminée, pas d’autre chose) ; pour l’A. au contraire, la théorie de l’être objectif aurait la fonction de fonder la clarté et la distinction des idées en garantissant la possibilité de parvenir par réflexion à des idées de plus en plus claires et distinctes. – Au-delà des conclusions et des analyses proposées, cette contribution apparaît assez complexe et complète. On s’étonne pourtant de l’absence de toute référence à l’importante littérature européenne sur le thème de l’être objectif et de la noétique cartésienne. Un approfondissement en ce sens aurait sans doute permis à l’A. de renforcer sa lecture et d’être plus averti de quelques interprétations discutables. Par exemple, l’A. ne remarque pas assez que l’introduction de la notion de realitas obiectiva dans les Meditationes est éminemment et principalement requise par l’exigence de pouvoir démontrer l’existence de Dieu à partir des idées, et non par l’exigence de fonder le procès d’éclaircissement dont les idées peuvent pourtant faire l’objet (cela est au moins ce que permet d’établir avec toute certitude le texte des Meditationes) ; de plus, l’A. interprète la doctrine cartésienne de la réalité objective à la lumière de la doctrine de la fausseté matérielle qui, nonobstant l’insistance d’une certaine littérature critique, n’en constitue qu’un chapitre particulier et une exception. Bref, l’interprétation de la fausseté matérielle ici présentée est originale et intéressante mais, trop ambitieuse du point de vue théorique, elle rétroagit de manière sans doute peu légitime sur la doctrine de la réalité objective qui perd alors toute sa spécificité cartésienne.

Francesco Marrone

3.1.54. SIMMONS, Alison, « Cartesian Consciousness Reconsidered », Philosophers’ Imprint, 12, 2, 2012, 1-21.

3.1.55. SINGH, Sikander, Das Glück ist eine Allegorie. Christian Fürchegott Gellert und die europäische Aufklärung, Wilhelm Fink, 2012, 263 p. [contient un chapitre sur « Gellert et Descartes »]

3.1.56. SMITH C. U. M., Frixione Eugenio , FINGER, Stanley & WILLIAM, Clower, The Animal Spirit Doctrine and the Origins of Neurophysiology, OUP, 2012, 304 p., chap. 6, « René Descartes », p. 99-108.

3.1.57. SMITH, Renée, « Moore and Descartes Meet in a Bar », Think. Philosophy for Everyone, 11, 31, 2012, p. 21-26.

3.1.58. SOŁTYSIAK (Marek), « Pojęcie rozpoznania w kartezjańskiej koncepcji pamięci [Le concept de reconnaissance dans la doctrine cartésienne de la mémoire] », Logos i Ethos 2, 2011, p. 203-231 [en polonais].

3.1.59. SOSA, Ernest, « Descartes and Virtue Epistemology », et réponse de VAN ARRAGON, Raymond J. in CLARK, Kelly J. & REA, Michael, (éd.) Reason, Metaphysics and Mind. New Essays on the Philosophy of Plantinga, 2012, 220 p. p. 107-127.

3.1.60. TEXIER, Roger, « La place de l’animal dans l’œuvre de Descartes », L’Enseignement Philosophique, 2012, 62/4, p. 15-27.

3.1.61. TOYOOKA, Megumi, « Descartes ni okeru jounen no tokusei [Caractéristique des passions chez Descartes] », Journal for the philosophical moments in Tsukuba, 20, 2012, p. 106-121 [en japonais]

3.1.62. VON HERRMANN, Friedrich-Wilhelm, « Esposizione di Dio attraverso l’analitica della coscienza e trascendenza originaria dell’autocoscienza nelle ‘Meditazioni’ di Cartesio », Aquinas. Rivista Internazionale di Filosofia, 55, 2012, p. 135-144.

3.1.63. WEE, Cecilia, « Descartes’s Ontological Proof of God’s Existence », British Journal for the History of Philosophy, 20, 1, 2012, p. 23-40.

3.1.64. WIDDAU, Christoph Sebastian, Descartes und Whitehead über Körper und Geist, Marburg, Tectum, 2012, 110 p.

3.1.65. WIENAND, Isabelle, « Oordeel en deugd in de cartesiaanse moraalfilosofie [Jugement et vertu dans la philosophie morale cartésienne] », Tijdschrift voor Filosofie 2012, 74, 3, p. 461-483.

3.1.66. YOSHIDA, Haruka, « Descartes tetsugaku ni okeru seishin to shintai no kubetsu to gouitsu ni tsuite [La distinction âme-corps et leur union chez Descartes] », Journal of the Society of Letters and Human Sciences, 14, p. 1-14 [en japonais].

3.2. CARTESIENS

3.2.1. BARTHA, Paul, « Many Gods, Many Wagers : Pascal’s Wager Meets the Reduplicator Dynamics », in CHANDLER, Jake & HARRISON, Victoria S. (ed), Probability in the Philosophy of Religion, Oxford, Oxford University Press, 2012, 262 p., p. 187-208.

3.2.2. BEXLEY, Emmaline, « Quasi-absolute time in Francisco Suarez’s Metaphysical Disputations », Intellectual History Review, 22/1, 2012, p. 5-22.

3.2.3. BONANNI, Sergio Paolo, « La teologia moderna in Gregoriana : Suárez e le lezioni de fide del 1583 » in GILBERT, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

3.2.4. BOUCHILLOUX, Hélène, « Hobbes dans la Logique de Port-Royal », L’Enseignement Philosophique, 2012, 63/1, p. 4-18.

3.2.5. BOUCHILLOUX, Hélène, « Pascal. Une dialectique des figures de la guerre » in GRANGÉ, Ninon (éd.), Penser la guerre au XVIIe siècle, Saint-Denis, Presses Universitaires de Vincennes, 2012, 242 p., p. 161-180.

3.2.6. BROWN, Deborah, « Agency and attention in Malebranche’s theory of cognition », in PICKAVE, Martin & SHAPIRO, Lisa, Emotion and Cognitive Life in Medieval and Early Modern Philosophy, Oxford, Oxford University Press, 2012, 296 p., p. 217-233.

3.2.7. BUZON, Frédéric de, « Le bon usage de l’imagination : Malebranche lecteur des Regulae ad directionem ingenii », Rivista di storia della filosofia, 2012, 67, 4, p. 671-690.

3.2.8. CAMARERO, Luis Rodriguez, « El valor y la génesis de las pasiones humana en el último Descartes y en Spinoza », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 259-270.

3.2.9. CARBONE, Raffaele & VERMEIR, Koen 2012, « Malebranche et l’imagination puissante : Malebranche et les pouvoirs de l’imagination », Rivista Di Storia Della Filosofia, 2012/4, 67, p. 661-669.

3.2.10. DES CHENE, Dennis, « Suárez on Propinquity and the Efficient Cause », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 89-100.

3.2.11. DESCOTES, Dominique, « Pascal et les miracles », Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne, 2012, 113, 792/93, p. 105-114.

3.2.12 FERREYROLLES, Gérard, « Mourir avec Pascal », in BERTAUD, Madeleine & VERSINI, Laurent, Les écrivains devant la mort, Travaux de littérature, vol. XXV, Paris, Droz, 544 p. ; p. 127-138.

Article court, grands effets. À partir d’une étude de la mort, l’A. réexamine les lignes de force du corpus pascalien, dans ses dimensions théologique, apologétique et spirituelle. « Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie en tout le reste. On jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais » (fr. 197). L’un des bénéfices de cet article est de souligner l’absence d’une perspective tragique sur la mort chez Pascal en en pointant les éléments ridicules donc comiques, et de montrer comment ce qui nous accable peut aussi être l’occasion d’un abandon à la volonté de Dieu. Même si la mort n’intervient que très peu dans les Pensées, sa fonction est comparable à celle du péché : rien ne nous heurte autant mais sans sa prise en compte, nous restons une énigme pour nous-mêmes. Comme souvent chez Pascal, il s’agit de montrer que la nature a raison sans le savoir : l’homme n’était pas destiné à la mort. Ce qui était naturel dans l’état infralapsaire est contre-nature après la chute. Refuser de dire avec Montaigne que la philosophie est une méditation de la mort revient-il à priver la philosophie de tout objet, et donc à asseoir son inutilité ? Reste que le travail de Pascal consiste en un démontage rationnel du travail de l’imagination, laquelle entoure la mort de « fausses images » : elle voit de la putréfaction là où il est question de purification, elle souligne le hasard, là où règne l’infaillibilité du décret divin. Soit l’imagination nous cache la mort, en mettant en place l’économie du divertissement, soit elle la banalise, notre vanité faisant que nous pouvons vouloir mourir pour une opinion. L’A. explique cette apparente contradiction par « une de ces voltes de l’imagination dont l’apologiste sait user » ; mais ces voltes ne menacent-elles pas la cohérence de l’édifice apologétique ? C’est par une semblable volte de l’imagination que nous passons de la difficulté à vivre au présent à la définition de ce même présent comme étant le lieu de la rencontre avec Dieu. Difficile de ne voir qu’une palinodie de l’imagination dans ce qui ressemble à une contradiction. L’A. apporte une explication : on ne vainc l’imagination que par l’intérêt, en mettant en jeu le calcul rationnel. « Si vous mourez sans adorer le vrai principe, vous êtes perdu » (fr. 190) : éviter la perdition pour atteindre un bonheur éternel se fait par un calcul rationnel. C’est par là que l’on élucide ce système de passages propre à la stratégie pascalienne : passage d’une apologétique par la mortalité à une mystique de la mort (celle du Christ et avec lui de la nôtre), passage de la méditation du péché – qui prend ainsi la place de la méditation montanienne de la mort – à une méditation de l’humanité de Jésus-Christ, passage de la chair, instance de la concupiscence, au corps, assumé par le Christ donc sauvé. Comment toutefois concilier cette croyance avec le fait que le corps paraît chez Pascal comme ce qui en l’homme n’est pas humain : « ce qui est nature aux animaux, nous l’appelons misère en l’homme » (fr. 149) ?

Laurence Devillairs

3.2.13. FRANCESCHI, Sylvio H. de, « La controverse théologique par l’instruction pastorale. Délectation victorieuse et prémotion physique selon Fénelon : à propos de la Théologie de Châlons de Louis Habert (1711) », in GAY, Jean-Pascal, et STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les ‘métamorphoses’ de la théologie. Théologie, littérature, discours religieux au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p., p. 147-172.

3.2.14. FRÉMONT, Christiane, « Les replis du cœur : François Lamy et la méconnaissance de soi », in FRÉMONT, Christiane (éd.), Questions sur la connaissance de soi à l’âge classique, numéro de la revue Corpus, 63, 2012, 139 p., p. 39-64.

3.2.15. FRIGO, Alberto, « “Notre âme est jetée dans le corps”. Funzione e figure del corpo nelle Pensées di Pascal », Alvearium V (5) 2012, p. 47-61.

Cet article se propose d’expliquer un paradoxe dans la pensée pascalienne : alors que le terme « corps » apparaît fréquemment dans l’ensemble de son œuvre, Pascal ne définit nulle part l’essence des choses corporelles. Ce phénomène s’explique par la thèse centrale de l’article, à savoir que Pascal ne s’intéresse pas à ce que le corps est, mais à ce que le corps fait. En mettant en cause la possibilité de définir l’essence du corps, Pascal se concentre sur son fonctionnement et, au lieu de dire en quoi sa nature consiste, il élabore la phénoménologie de la figure du corps. L’A. prouve cette thèse novatrice d’une manière convaincante en quatre parties. (1) D’abord, si Pascal ne donne aucune définition de l’essence des choses corporelles, c’est parce qu’il considère la nature du corps comme inconnaissable. La nature du corps reste cachée mais sa figure peut être saisie dans son fonctionnement. D’où (2) une deuxième thèse, non moins originale : que le corps se caractérise chez Pascal par une passivité radicale, passivité présentée sur la base d’un fragment négligé par les commentateurs (L. 795). Il s’agit de montrer que le corps est capable d’absorber « toutes les fonctions de l’âme » et de la dominer totalement par le plaisir en réduisant l’âme à « une passivité fondamentale ». (3) La troisième partie démontre la passivité du corps en précisant son rôle dans la connaissance des premiers principes. Contrairement à D., Pascal s’intéresse non seulement à l’accès aux principes mais aussi à leur origine qu’il découvre dans le corps. Or, selon l’A., le fait que l’âme trouve les principes dans le corps suppose également que le corps soit « la figure d’une passivité fondamentale » (p. 56). (4) Enfin, l’A. montre que le corps remplit une fonction persuasive : le fameux « Discours de la machine » vise à profiter de la passivité du corps pour faire accepter à l’homme des vérités que la volonté refuse de suivre. L’A. met en parallèle le corps humain avec la machine d’arithmétique qui produit les résultats demandés « sans même l’intention de celui qui s’en sert » (p. 59). – L’originalité de cet article consiste à faire de la passivité l’unité entre les différents usages du terme « corps » chez Pascal. Mais les arguments laissent une question ouverte : comment une passivité radicale est-elle capable de « fonctionner », d’« agir », de « dominer », ou de « persuader » ? Autrement dit, comment l’activité peut-elle être conciliée avec la passivité radicale dans le corps humain ? Dans la conclusion, l’A. rapproche le corps compris comme passivité radicale du corps qui apparaît dans la liasse « Morale chrétienne » et celui qui fait l’unité des « membres pensants ». Ce dernier étant le sujet d’autres publications de l’A., nous espérons l’élaboration d’une interprétation qui montrera l’unité de l’usage du terme « corps » dans l’ensemble de la pensée pascalienne.

Tamás Pavlovits

3.2.16. GENY, Vincent, « Malebranche lecteur de Bernard Lamy ou la physique de la parole », Dix-Septième Siècle, 2012/2, 255, p. 227-239.

3.2.17. HÁJEK, Alan, « Blaise and Bayes », in CHANDLER, Jake & HARRISON, Victoria S. (éd), Probability in the Philosophy of Religion, Oxford, Oxford University Press, 2012, 262 p., p. 167-186.

Loin d’une évaluation du point de l’histoire de la philosophie, l’A. utilise le calcul sur les infinis ainsi que les principes de théorie de la décision pour évaluer les trois arguments pragmatiques successifs en faveur de la croyance à l’existence de Dieu qui forment le « pari de Pascal », au moins dans les grandes lignes de sa reconstitution classique depuis I. Hacking (« The logic of Pascal’s Wager », American Philosophical Quarterly, 9 (2), 1972, p. 186-192) : l’argument dit de la dominance, l’argument de l’utilité escomptée, et enfin, le plus célèbre des trois probablement, l’argument de l’utilité escomptée dominante. L’A. cherche à montrer que les corrections qu’il envisage aux formulations de Hacking soit ne suffisent pas à rendre ces arguments conclusifs, soit ne le peuvent qu’au prix d’assomptions qu’un pascalien ne pourrait accepter.

Ide Fouche-Levi

3.2.18. HATTAB, Helen, « Suarez’s Last Stand for the Substantial Form », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 101-120

3.2.19. LE JALLÉ, Eléonore, « Hume, Malebranche, and the Self-Justification of the Passions », Hume Studies, 2012, 38/2, p. 201-220.

3.2.20. LEIJENHORST, Cees, « Suarez on Self-Awareness », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 137-153.

3.2.21. LEVY, Lia, « ‘Spinoza não sabia lógica’. Liberdade sem contingência ? », in PEREIRA, Luiz Carlos, ZINGANO Marco & LEVY, Lia (éd.), Metafísica, Lógica e outras coisas mais, Rio de Janeiro, Nau Editora, 2012, v. 1, p. 190-216. [en portugais].

3.2.22. LEVY, Lia, « Duas traduções e um argumento: o “sonho” do livre arbítrio segundo Espinosa », in FONSECA, A. C. da Costa, POHLMANN, E. A & GOLDMEIER, G.. (éd.), Ética, política e esclarecimento público. Ensaios em homenagem a Nelson Boeira, Porto Alegre, Bestiário, 2012, v. 1, p. 320-327. [en portugais]

3.2.23. LEWIS, John, « Mersenne as Translator and Interpreter of the Works of Galileo », MLN, 2012, 127, 4, p. 754-782.

3.2.24. MEHL, Edouard (éd.), La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p.

Ce volume rassemble les actes du colloque « La science et sa logique. Controverses sur le statut épistémique de la logique à l’époque moderne », organisé en septembre 2011 par le Centre de Recherches en Philosophie allemande et contemporaine (CEPHRAC) de l’Université de Strasbourg. Son enjeu principal, comme l’indique É.  Mehl dans son article introductif (« De quoi la logique est-elle la science ? », p. 9-20), était d’expliquer comment la logique est passée du rang d’un instrument de la raison à celui d’une « science réale » (p. 10) ultimement incarnée dans la « science de la logique » hégélienne et, pour ce faire, de déterminer quel rôle médiateur les modèles cartésien et kantien de la mathesis universalis et de la « logique transcendantale » ont pu jouer au sein de ce devenir. Mais, au-delà du glissement moderne de « la » logique vers « le » logique, se trouvait aussi le projet de la phénoménologie comme tentative de mettre au jour l’enracinement de la logique dans la sphère intuitive (Husserl) et dans l’ontologie (Heidegger) : si d’une part se pose la question de savoir « de quoi la logique est la science », se pose aussi bien celle de comprendre d’où vient sa position à la fois dominante et fondamentale au sein de la rationalité moderne.

Nous nous arrêterons dans ce compte rendu sur la première moitié de l’ouvrage (p. 21-204) consacrée à l’époque cartésienne au sens large, où nous distinguerons trois moments. (1) L’intrication de la logique et de la méthodologie — S. Roux (« Logique et méthode au xviie siècle », p. 21-45) montre que le destin moderne de la logique ne peut être compris qu’à partir de l’émergence de la méthode avec laquelle elle se trouve constamment associée voire confondue. Que la logique aristotélicienne fasse l’objet d’une vive critique (p. 26-29) et que la méthode soit appelée à s’y substituer ne doit pas occulter le fait que la logique, portée par ses conceptions renaissantes (Ramus ou Zabarella), survit au sein même de la réflexion méthodologique moderne. En outre, si la methodus ne se substitue pas purement et simplement à la logica, c’est parce qu’elle ne bénéficie pas de cette unité dont jouissait autrefois la théorie aristotélicienne du syllogisme, et se dissémine en plusieurs modèles (répertoriés p. 29-40) qui entraînent son « équivocité » tout au long de l’âge classique. La situation cartésienne est emblématique : l’interprétation de la méthode cartésienne constitue alors un enjeu central dans la manière de ressaisir et d’organiser les méthodes de la science mais, comme l’indique Baillet (p. 42-44), elle contribue plutôt à accroître la confusion entre logique et méthode. M. Spallanzani (« ‘Trouver quelques vérités dans les sciences’. Les Essais de D. entre méthode et découverte scientifique », p. 47-76) complète cette enquête en rappelant que pour Baillet la logique de D. est à chercher plutôt du côté des cartésiens, et en proposant un examen de « méthode industrieuse » de D., celle qui se trouve dans les écrits scientifiques, qui confirme qu’elle est « affaire d’opérations plutôt que de principes » (p. 52). L’article de M. Pécharman (« Les principes de la science selon Hobbes », p. 113-146) éclaire tout autrement la relation entre logique et méthode : à l’intérieur même du projet philosophique de Hobbes s’articulent deux moments, concrétisés dans les définitions hobbesiennes de la philosophie, celui de la « logique de la démonstration », incarnée dans le savoir mathématique, et celui d’une « méthode inventive » qui prend son départ dans la sensation comme effet généré par une cause. La logique s’arrime ainsi à la corporéité et se déploie comme connaissance des causes et des effets tout en accomplissant sa dimension originairement apodictique. – (2) Les mutations de la logique classique du point de vue allemand – É. Cassan (« L’institution de la logique chez Joachim Jungius (1587-1657) : modalités et enjeux conceptuels », p. 77-92) s’arrête sur le cas de Jungius et de sa Logica Hamburgensis qui propose, plutôt qu’une logique formelle, une « analyse des opérations fondamentales de la pensée » (p. 79). Cette logique procède alors de manière réflexive, sur la base d’une certaine experientia du moi pensant, qui permet d’engager une description de la composition immanente des « notions », autrefois saluée par Leibniz. F. De Buzon (« La logique de Port-Royal vue d’Allemagne : formes, lumière naturelle, raisonnements complexes », p. 93-112) poursuit la réflexion sur Jungius en procédant à l’étude comparée du traitement des raisonnements complexes dans L’Art de penser et dans la logique jungienne, afin d’évaluer la critique que Vagetius, éditeur de la Logica Hamburgensis, adressa aux Messieurs de Port-Royal. L’originalité de L’Art de penser est d’appliquer aux raisonnements complexes un double traitement en lieu et place de l’habituelle analyse ou réduction syllogistique : traitement par l’exemple ou traitement par le recours à la seule lumière naturelle. Or c’est cette lumière naturelle elle-même qui possède un certain contenu logique : sa nature intuitive se ramène à l’application de préceptes généraux par lesquels nous pouvons, quasi immédiatement, juger des relations d’extension entre les concepts au sein de n’importe quel raisonnement (p. 106). Vagetius, à rebours de cette logique spontanée, propose un approfondissement de la mise en forme des raisonnements complexes, suivant donc le fil aristotélicien mais pour rapprocher la théorie du syllogisme du langage naturel. (3) L’émergence d’une logique du concevable – Si Port-Royal participe à l’affaiblissement de la syllogistique en même temps qu’à la promotion d’une logique prenant pour objet les actes de « concevoir, juger et ordonner » (p. 97), c’est cette logique de la conception et ou plutôt de la « concevabilité » qui se trouve au cœur de la philosophie première de Tschirnhaus dont M. Savini (« La Medicina mentis d’Ehrenfried Walther von Tschirnhaus en tant que ‘Philosophie première’», p. 147-172) étudie d’abord le projet global avant d’examiner le mouvement par lequel logique et philosophie première s’unissent en une théorie de l’ens ut conceptibile. Originalité de Tschirnhaus, cette « concevabilité » dépend d’un conatus, c’est-à-dire d’une dimension performative : la logique se trouve alors articulée à la vie même du sujet pensant. La théorie de Tschirnhaus constitue en outre un élément du dossier examiné par G. Coqui (« Les modalités entre ontologie et logique, de l’époque de Descartes à celle de Kant », p. 173-204), celui de l’effacement du sens ontologique du nécessaire à l’époque classique, effacement qui culmine dans l’assimilation kantienne de la nécessité à l’apriorité. Le mérite de ce travail n’est pas seulement d’instruire un tel dossier, mais de montrer aussi comment D., lorsqu’il rejette la notion même d’impossibilité objective dans les Secondes Réponses pour lui substituer une simple « repugnantia in nostro conceptu », entraîne peut-être avec lui tout un pan de la pensée ultérieure. La doctrine de la création des vérités éternelles se trouve au principe de cette impossibilité dans laquelle nous nous trouvons de nous prononcer sur ce qui est objectivement ou réellement impossible. À cause d’elle, la question des modalités en général est évacuée en dehors de l’ontologie et la notion d’une preuve de l’existence de Dieu, perdant toute portée ontologique, se trouve condamnée à l’impuissance.

En définitive, ce collectif, dans son moment cartésien, propose un parcours riche et cohérent qui expose les transformations de la logique à l’âge classique dans sa confrontation avec la méthode et l’émergence d’une logique nouvelle que Kant mènera plus loin encore dans le sens d’une analytique de la subjectivité.

Olivier Dubouclez

3.2.25 MITTMANN, Rainer, Der Wahrheitsbegriff bei Descartes und Malebranche, Munich, Philosophia, 2012, 344 p.

3.2.26. MURATORI, Cecilia, « Henry More on Human Passions and Animal Souls », in EBBERSMEYER, Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 207-224

3.2.27. NOLAN, Lawrence, « Malebranche on Sensory Cognition and ‘Seeing As’ », Journal of the History of Philosophy, 2012, 50, 1, p. 21-52.

3.2.28. NORDIN, Svante, Drottningen och filosofen : mötet mellan Christina och Descartes, Stockholm, Atlantis, 220 p.

3.2.29. PASTERNACK, Lawrence, « The many Gods objection to Pascal’s Wager : A decision theoretic response », A journal of philosophy, 152/2, 2012, p. 158-178.

3.2.30. PELLEGRIN, Marie-Frédérique, « Sorciers et loups-garous, rêveries des démonographes la contagion imaginative chez Malebranche », Rivista Di Storia Della Filosofia, 2012, 67, 4, p. 691-704.

3.2.31. PIAIA, Gregorio, « Cartesianism and History : From the Rejection of the Past to a ‘Critical’ History of Philosophy », in SGARBI, Marco (éd.), Translatio Studiorum. Ancient, Medieval and Modern Bearers of Intellectual History, Leiden, Brill, 2012, xiv-263 p., p. 151-154.

Cette étude, intéressante d’un point de vue historique, s’insère dans un ouvrage collectif consacré au thème de la Translatio studiorum depuis l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. Il est remarquable que D. puisse trouver place dans un tel domaine de réflexion puisqu’il revendique l’instauration d’une philosophie radicalement « nouvelle », qui sépare la vraie science de l’histoire et ne tend nullement à puiser ses fondements dans l’étude des auteurs passés ou dans une quelconque tradition. L’intérêt de cet article est de montrer que non seulement nous pouvons nuancer la volonté cartésienne de rupture avec la tradition humaniste (notamment en s’appuyant sur les quelques textes de D. relatifs au bon usage des livres et de la « conversation » avec les grands hommes du passé), mais surtout que le cartésianisme va favoriser l’émergence d’une nouvelle manière de pratiquer l’histoire de la philosophie, qui mobilise notamment la liberté du jugement, de l’esprit critique, tout en refusant une attitude de célébration à l’égard des Anciens. Ainsi, par exemple, chez un historien de la philosophie du début du XVIIIe siècle comme André-François Boureau-Deslandes, fortement influencé par Malebranche (encore plus sévère que D. à l’égard des simples « historiens »), l’opposition typiquement cartésienne entre « historien » et « philosophe » devient intérieure à la pratique historiographique elle-même.

Frédéric Lelong

3.2.32. PINK, Thomas, « Reason and Obligation in Suarez », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 175-208.

3.2.33. RAGLAND, Evan, « Chymistry and Taste in the Seventeenth Century: Franciscus Dele Boe Sylvius as a Chymical Physician Between Galenism and Cartesianism », Ambix, 2012, 59/1, p. 1-21.

3.2.34. ROZEMOND, Marleen, « Unity in the Multiplicity of Suarez’s Soul », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 154-174.

3.2.35. SALICETI, Marion, « Malebranche et l’imagination : une analyse psychosomatique », Rivista di storia della filosofia, 2012, 67, 4, p. 727-743.

3.2.36. SAVINI, Massimiliano, « Un nuovo argomento per l’esistenza di Dio alla prova : l’Examen novi argumenti… inventi ab Escalache di J. Clauberg », Giornale critico della filosofia italiana, 2012, 3, p. 595-614.

3.2.37. SCHMALTZ, Tad M., « Causation and causal axioms », in DETLEFSEN, Karen (éd.), Descartes’ Méditations. A Critical Guide, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 275 p., p. 82-100.

3.2.38. SCHMALTZ, Tad, « Substantial Forms As Causes : From Suárez to Descartes » in MANNING, Gideon (éd.), Mater and Form in Early Modern Science and Philosophy, Leiden, Brill, x-248 p., p. 125-150.

3.2.39. SCHUURMAN, Paul, « Fénelon on Luxury, War and Trade in the Telemachus », History of European ideas, 2012, 38/2, p. 179-199.

3.2.40. SECADA, Jorge, « Suarez on Continuous Quantity », in Hill, Benjamin & Lagerlund, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 75-88

3.2.41. SELLIER, Philippe, « Pascal et le Contre Fauste » in BOCHET, Isabelle (éd.), Augustin philosophe et prédicateur. Hommage à Goulven Madec, Paris, Institut d’Etudes Augustiniennes, Paris, 2012, 590 p., p. 523-536.

3.2.42. SELLIER, Philippe, Port-Royal et la littérature, II. Le siècle de saint Augustin, La Rochefoucauld, Madame de Lafayette, Madame de Sévigné, Sacy, Racine, Paris, Honoré Champion, 2012, 610 p.

3.2.43. SHAPIRO, Lisa, « How we experience the world : Passionate perception in Descartes and Spinoza », in PICKAVÉ, Martin & SHAPIRO Lisa, Emotion and Cognitive Life in Medieval and Early Modern Philosophy, Oxford, Oxford University Press, 2012, 296 p., p. 193-216.

3.2.44. SHIELDS, Christopher, « Shadows of Beings : Francisco Suarez’s Entia Rationis », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 57-74.

3.2.45. SOUTH, James B., « Suarez, Immortality, and the Soul’s Dependance on the Body », in HILL, Benjamin & LAGERLUND, Henrik (éd), The philosophy of Francisco Suárez, Oxford, Oxford University Press, 2012, 320 p., p. 121-136.

3.2.46. SPRINGBORG, Patricia, « Hobbes Challenge to Descartes, Bramhall and Boyle : A corporeal God », British Journal for the History of Philosophy, 20, 5, 2012, p. 903-934.

3.2.47. TODERICI, Radu, « Nicolas malebranche et bernard lamy: Deux perspectives sur l’imagination », Rivista Di Storia Della Filosofia, 2012, 67/4, p. 745-758.

3.2.48. TRÉMOLIÈRES, François, « Malebranche moraliste. La lecture du jeune Rébelliau », Dix-septième siècle, 2012, 255, 2, p. 273-283.

3.2.49. VIDAL Nathalie & VOGT Dominique, « Les machines arithmétiques de Blaise Pascal », Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne, 2012, 113, 792/93, p. 53-72.

3.2.50. WEIß, Otto, « Der erste aller Christen ». Zur deutschen Pascal-Rezeption von Friedrich Nietzsche bis Hans von Balthasar, Regenburg, Pustet, 2012, 240 p.

3.3. DIVERS

3.3.1. ANGEBAULT, Christophe, « Pouvoir des clés, pénitence et correction fraternelle dans les querelles du jansénisme. De la Fréquente communiond’Arnauld à la Dixième provinciale de Pascal », in GAY, Jean-Pascal, et STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les ‘métamorphoses’ de la théologie. Théologie, littérature, discours religieux au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p., p. 45-68.

3.3.2. ARMOGATHE, Jean-Robert, Histoire des idées religieuses et scientifiques. Quarante ans d’enseignement à l’Ecole pratique des hautes études, Turnhout Brepols, 2012, 227 p.

3.3.3. BALZA, Isabel, « La escritura filosófica como método de conocimiento : Zambrano, Descartes y Bernhard », Escritura e imagen, 8, 2012, 193-208. [en espagnol].

3.3.4. BASSIRI, Nima, « Material Translations in the Cartesian Brain », Studies in History and Philosophy of Biological and Biomedical Sciences, 43, 1, 2012, p. 244-255.

3.3.5. BLUM, Paul R., Studies on Early Modern Aristotelianism, Leiden, Brill, 2012, 389 p.

3.3.6. BORD, André, La vie de famille chez les Pascal, Paris, Le Cerf, 2012, 165 p.

3.3.7. BRADING, Katherine, « Newton’s Law-Constitutive Approach to Bodies: A Response to Descartes », in JANIAK, Andrew & SCHLIESSER, Eric, Interpreting Newton, Critical Essays, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 450 p., p. 13-32.

3.3.8. BRANCO, Guilherme Castelo, « La présence de Descartes et de Kant dans l’œuvre de Foucault », Rue Descartes 3/ 2012 (n° 75), p. 72-80.

3.3.9. BROAD, Jacqueline, « Women, Mechanical Science, and God in the Early Modern Period », in STUMP, J.B. & PADGETT, Alan G., The Blackwell Companion to Science and Christianity, Wiley-Blackwell, 2012, 664 p., p. 26-36.

3.3.10. BROOKE, Christopher, Philosophic Pride. Stoicism and political thought from Lipsius to Rousseau, Princeton, Princeton University Press, 2012, 296 p., chap. 7, « From Fénelon to Hume », p. 149-180.

3.3.11. BUZON, Frédéric de, « La Logique de Port-Royal vue d’Allemagne : formes, lumière naturelle, raisonnements complexes », in MEHL, Edouard (éd.),La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p., p. 93-112

3.3.12 BUZON, Frédéric de, « Littérature et fiction : Leibniz et Malebranche », Dix-septième siècle, 2012, 255, 2, p. 241-256.

3.3.13. CAMILLERI, Sylvain, and TAKÁCS Ádam (éd.), Jean-Luc Marion. Cartésianisme, phénoménologie, théologie, Paris, Archives Karéline, 2012, 191 p.

3.3.14. COQUI, Guillaume, « Les modalités entre ontologie et logique, de l’époque de Descartes à celle de Kant », in MEHL, Edouard (éd.), La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p., p. 173-204.

3.3.15. D’HOEST, Florelle, « Voluntad de verdad y principio de veracidad en el aprendizaje: Una conversación entre Descartes, Rancière y Deleuze », Revista de Filosofía, 7, Época II, p. 409-421. [en espagnol].

3.3.16. DAVENPORT, Anne, « English Recusant Networks and the Early Defense of Cartesian Philosophy », Journal of Early Modern Studies, 2012, 1, 1, p. 65-85.

3.3.17. DES CHENE, Dennis, « Using the Passions », in PICKAVÉ, Martin & SHAPIRO Lisa, Emotion and Cognitive Life in Medieval and Early Modern Philosophy, Oxford, Oxford University Press, 2012, 296 p., p. 176-192.

3.3.18. DRABAREK (Anna), « Spór o szaleństwo [Querelle sur la folie] », Zagadnienia Naukoznawstwa, 47, 2011, p. 647-655 [en polonais].

3.3.19. DROZDOWICZ (Zbigniew), « Racjonalność afirmacji i racjonalność negacji typu kartezjańskiego [Le caractère rationnel de l’affirmation et de la négation du type cartésien] », Przegląd Filozoficzny 21, 3, 2012, p. 475-487 [en polonais].

3.3.20. DURAKOGLU, Abdullah & AY, Volkan, « The Problem of Mind in Descartes and Searle », FLSF, Felsefe ve Sosyal Bilimler Dergisi [Journal of Philosophy and Social Sciences], 2012, 13, p. 187-200

3.3.21. DURU, Audrey, Essais de soi : poésie spirituelle et rapport à soi, entre Montaigne et Descartes, Genève, Droz, 2012, 509 p.

3.3.22. EASWARAN, Kenn & MONTON, Bradley, « Mixed Strategies, Uncountable Times, and Pascal’s Wager : A Reply to Robertson », Analysis, 72, 4, p. 681-685.

3.3.23. EDWARDS, Michael, « Philosophy, Early Modern Intellectual History, and the History of Philosophy », in PAPAZOGLOU, Alexis (éd.), The Pursuit of Philosophy : Some Cambridge Perspectives, Wiley-Blackwell, 2012, 178 p., p. 81-93.

3.3.24. FATTORI, Marta, « Dealbare Aethiopem : A Metaphor of the Translatio Studiorum at the Origins of Modernity », in SGARBI, Marco (éd.), Translatio Studiorum. Ancient, Medieval and Modern Bearers of Intellectual History, Leiden, Brill, 2012, xiv-263 p., p. 155-176.

3.3.25 FENNEN, Keith G., « Indeterminate Judgment and Great Deeds », International philosophical quarterly, 2012, 52/1, 205, p. 21-39.

3.3.26. FRIAS, Lincoln Thadeu Gouvêa de, « A moralidade do descarte e da seleção de embriões », Educação e Filosofia, 26, 51, 2012, p. 207-230. 24 p. [en portugais].

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3.3.28. GARBER, Daniel & RUTHERFORD, Donald (éd.), Oxford Studies in Early Modern Philosophy, vol VI, Oxford, Oxford University Press, 2012, 400 p.

3.3.29. GAY, Jean-Pascal, et STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les ‘métamorphoses’ de la théologie. Théologie, littérature, discours religieux au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p.

3.3.30. GILBERT, Paul (éd.), L’uomo moderno e la chiesa : atti del congresso 16-19 novembre 2011, Rome, Gregorian & Biblical Press, 2012, 488 p.

3.3.31. GILDIN Hilail, « David Hume’s Two Interpretations of Cartesian Doubt », Interpretation – Journal of Political Philosophy, 2012, 39/1, p. 83-93.

3.3.32. GOMARASCA, Paolo, Enjeu cartésien et philosophie du corps. Etudes d’anthropologie moderne, Bern, Peter Lang, 2012, 168 p.

3.3.33. GONTIER, Thierry, « Absolutisme théologique et auto-affirmation de l’homme chez Descartes et chez Blumenberg », Revue de métaphysique et de morale, 2012, 73/1, p. 65-78.

3.3.34. GONZÁLEZ ROMERO, Félix, « La rehabilitación del mundo emocional en la modernidad. Los predecesores de la ética cartesiana. El estoicismo moderno. » Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 239-248.

3.3.35. GONZÁLEZ ROMERO, Félix. Pasiones, amor y compasión en la construcción del sujeto moderno. Los predecesores de Descartes, siglos XVI y XVII, Madrid, Universidad Pontificia Comillas, 2012, 243 p.

Présenté comme une étude préalable à un travail sur la constitution de la conception cartésienne des passions et de la morale dont la parution est annoncée, ce travail porte sur les sources de la réflexion cartésienne, en privilégiant trois concepts (passions, amour et pitié) qui donnent à lire de manière particulièrement significative les reprises ou déplacements cartésiens intégrés au projet d’une morale qui vise l’affermissement de l’ego. Les développements, monographiques et comparatistes, sont consacrés à J. Lipse, G. Du Vair et P. Charron (au titre du néo-stoïcisme et de son influence sur D.), à F. de Sales et J.-L. Vives (au titre de leur influence sur la conception cartésienne de l’amour), à J.-P. Camus, N. Coeffeteau, J.-F. Senault et M. Cureau de la Chambre (comme autant de rédacteurs de traités de morale sur les passions dont D. souhaite se démarquer). L’ouvrage, d’une incontestable ampleur dans son projet, souffre cependant de sa mise en œuvre : laissant à un ouvrage postérieur l’étude de D., les exposés monographiques sont pourtant rapportés aux positions cartésiennes, ce qui aboutit à des rapprochements – ou à la mesure d’écarts – trop rapidement exposés, insuffisamment étayés et exclusivement thématiques, ainsi qu’à des développements sur les sources cartésiennes trop concis et généraux. Aussi, ne peut-il que pâtir de la comparaison avec le classique et pour l’instant insurpassé d’A. Levi, French moralists. The Theory of Passions : 1585 to 1649 (Oxford, 1964), que l’A. ne cite pas dans sa bibliographie et ne commente pas, sauf erreur, dans son texte. On ne peut qu’espérer que le second volume annoncé fasse droit à la question des sources cartésiennes fondée sur une interprétation préalablement étayée des propres positions de D.

Gilles Olivo

3.3.36. GORI, Gambatista & SPALLANZANI, Mariafranca (éd.) Rivista Di Storia Della Filosofia, 2012/1, 67, ‘Commentatio Mortis’, Le morti di filosofi in epoca moderna (numéro spécial)

3.3.37. GOTTWALD, Benedikt I., « 17th Century French Philosphy », Student Foreign Language Research, 2012, Paper 9. En ligne :http://digitalcommons.conncoll.edu/sflresearch/9

3.3.38. HACHE, Sophie, « Balzac en théologie : les douze Discours du Socrate chrestien (1652) » in GAY, Jean-Pascal, et STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les ‘métamorphoses’ de la théologie. Théologie, littérature, discours religieux au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p., p. 23-44.

3.3.39. HATFIELD, Gary C., « Mechanizing the Sensitive Soul », in MANNING, Gideon (éd.), Mater and Form in Early Modern Science and Philosophy, Leiden, Brill, x-248 p., p.151-186.

3.3.40. HAYASHI, Yosuke, « Descartes testugaku ni okeru shintai kyoiku ron no tetsugakuteki kiso [La base philosophique de l’éducation physique selon Descartes] », Journal of philosophy of physical education, 43, 2012, p. 1-15 [en japonais]

3.3.41. HILL, James, « Na obranu mysli: odpověď Tomáši Machulovi = In Defence of Mind: A Reply to Tomáš Machula », Filosofický časopis 60, 4, 2012, p. 575-584.

3.3.42. HOFFMAN, Paul, « Reasons, Causes, and Inclinations », in PICKAVÉ, Martin & SHAPIRO Lisa, Emotion and Cognitive Life in Medieval and Early Modern Philosophy, Oxford, Oxford University Press, 2012, 296 p., p. 156-175.

3.3.43. IHARA, Kenichiro, « Descartes no junkan (3) [Le cercle de Descartes (3)] », The journal of social sciences and humanities, 459, 2012, p. 53-86 [en japonais]

3.3.44. KASAKI, Masashi, « Descartes teki kaigiron ni taisuru shoronshou to sono zentei [Plusieurs arguments en faveur du scepticisme cartésien et leurs présuppositions] », Philosophy, 2012, p. 171-184 [en japonais].

3.3.45. KIDA, Gen, « Tetsugakusanpo (10) Descartes wo meguru josei tachi [Promenade philosophique (10) : les femmes autour de Descartes] », Bungakukai, 66 (1), 2012, p. 214-217 [en japonais].

3.3.46. KUGIMIYA, Akemi, « Kouzo to shinpi : Mori Arimasa no “keiken” shiso ni okeru Pascal to Descartes [Construction et mystère : Pascal et Descartes dans la philosophie de l’ ‘Expérience’ de Mori Arimasa] », Recueil des recherches de la culture chrétienne de l’Université de Shirayuri, 2012, p. 10-46 [en japonais].

3.3.47. LE VIGAN, Pierre, Ecrire contre la modernité, Choisy-le-Roi, La Barque d’or, 160 p. [études dont une sur Montaigne et une sur Pascal].

3.3.48. LEMA HINCAPIÉ, Andrés, « Berkeley y su inmaterialismo ontológico: Elementos básicos », Dialogos. Revista del Departmento de Filosofia Universidad de Puerto Rico, 44, 93, 2012, p. 141-165. [en espagnol].

3.3.49. LEONI, Federico, « Le ‘Cogito’ et le lézard mexicain: La philosophie et le reste des sciences chez le dernier Merleau-Ponty », Chiasmi International. Trilingual Studies concerning Merleau-Ponty’s Thought, 14, 2012, p. 113-129.

3.3.50. LLINÀS, Joan Lluís, « Montaigne i Descartes: dues propostes modernes de vida », Anuari de la Societat Catalana de Filosofia : Revista de Filosofia, 23, 2012, 121-134 [en catalan].

3.3.51. LOJACONO, Ettore, « Il dibattito moderno sullo scetticismo », Giornale critico della filosofia italiana, 2012, 1, p. 142-146.

3.3.52. MANNING, Gideon (éd.), Matter and Form in Early Modern Science and Philosophy, Leiden, Brill, x-248 p.

3.3.53. MARIANELLI, Massimiliano, Il primato delle passioni. Alain interprete di Descartes, Milan, Mimesis, 2012, 146 p.

3.3.54. MARION, Jean-Luc, La rigueur des choses. Entretiens avec Dan Arbib, Paris, Flammarion, 2012, 297 p., chap. II, « Descartes, p. 71-118.

3.3.55. MATVIYEVSKAYA Galina Pavlovna, МАТВИЕВСКАЯ (Галина Павловна), Рене Декарт, 1596-1650 : жизнь и научное наследие [René Descartes: sa vie et l’héritage scientifique], Москва URSS Либроком, 2012, 269 p.

3.3.56. MCGUIRE, J. E. & SLOWIK, Edward, « Newton’s Ontology of omnipresence and infinite space », in GARBER, Daniel & RUTHERFORD, Donald (éd.),Oxford Studies in Early Modern Philosophy, vol VI, Oxford, Oxford University Press, 2012, 400 p., chap. 9, p. 279-308.

3.3.57. MCKENNA, Antony, « Le débat sur le plaisir et sur le bonheur à l’âge classique », in ERLER, Michael & ROTHER, Wolfgang (éd.), Philosophie der Lust. Studien zum Hedonismus, Basel, Schwabe, 2012, 343 p., p. 259-280.

3.3.58. MEHL, Edouard, « Auto-affection et cogito. Sur le cartésianisme de Michel Henry », in EBBERSMEYER, Sabrina (éd.), Emotional minds. The passions and the limits of pure inquiry in early modern philosophy, Berlin, De Gruyter, 2012, 320 p., p. 31-49.

3.3.59. MEHL, Edouard, « De quoi la logique est-elle la science ? », in MEHL, Edouard (éd.), La science et sa logique. Le statut épistémique de la logique de Descartes à Husserl, numéro des Cahiers Philosophiques de Strasbourg, 2012/2, 32, Strasbourg, Université de Strasbourg, 2012, 350 p., p. 9-20.

3.3.60. MICHON, Hélène, « La connaissance de soi : un chemin spirituel ? », in Frémont Christiane (éd.), Questions sur la connaissance de soi à l’âge classique, numéro de la revue Corpus, 63, 2012, 139 p., p. 83-100.

3.3.61. MIGASIŃSKI, Jacek, « Kartezjusz podług Henry’ego : początek fenomenologii [Descartes selon Henry : le commencement de la phénoménologie] »,Przegląd Filozoficzno-Literacki 2012, 3, p. 201-218 [en polonais].

3.3.62. MILIDRAG Predrag, « Problem razlikovanja ideja stvari od ideja nestvari kod Descartesa [La question d’une distinction des idées de choses des idées de non-choses] », Filozofska istraživanja 32, 2, 2012, p. 261–278, disponible en ligne http://hrcak.srce.hr/file/143006 [en serbe].

3.3.63. MILIDRAG, Predrag, « O (ne)dovoljnom razlogu za egzistenciju Boga u novovekovnoj filozofiji [Sur une raison (in-)suffisante pour l’existence de Dieu dans la philosophie moderne] », in BOŠKOVIĆ Dragan (éd.), Bog, Zbornik radova sa VI međunarodnog naučnog skupa održanog na Filološko-umetničkom fakultetu u Kragujevcu (28-29. X 2011), Kragujevac, Filološko-umetnički fakultet 2012, p. 157-168 [en serbe].

3.3.64. MILLER, James, Examined Lives: From Socrates to Nietzsche, New York, Picador USA, 2012, 422 p., chap. « Descartes », p. 199-226.

3.3.65. MOGHADDAM, Seyyed Rahmatollah Mousavi & ALIZAMANI, Amir Abbass, « Spiritual Health in Rene Descartes’ and Allameh Tabatabaei’s Views », Hekmat va Falsafeh, 7, 4, 28, 2012, Zemestan 1390, p. 63-84.

3.3.66. MONGIN, Jean-Paul & SCHWOEBEL, François, Le malin génie de monsieur Descartes: d’après les “Méditations métaphysiques”, Paris, Les Petits Platons, 2012, 63 p.

L’ouvrage prend place dans la collection « Les petits Platons » (de l’éditeur du même nom) après La folle Journée du Professeur Kant, Le meilleur des mondes possibles et La mort du divin Socrate, parus en 2010. L’idée de cette jeune collection est d’introduire l’univers de pensée des grands philosophes aux enfants au moyen des fables qu’ils développent eux-mêmes dans leurs écrits. C’est ici la fiction du Malin Génie qui constitue la trame de l’histoire. Des indications biographiques s’entremêlent aux réflexions du philosophe, simplifiées pour l’occasion. De sorte que l’exercice est pédagogiquement réussi en ce qu’il rend possible l’identification du lecteur au héros : pour être persuadé, le lecteur doit s’approprier l’inventio de l’auteur. Le texte de D., bien connu, est bien adapté, bien illustré, et agrémenté de quelques touches d’humour qui s’adressent parfois aux parents (c’est le perroquet de D., prénommé Baruch, qui incarne le Malin Génie…).

Julia Roger

3.3.67. MORENO ROMO, Juan Carlos, « Descartes y la Iglesia Católica : entre la Aeterni Patris y la Fides et Ratio », Analogía, 1, 2012, p. 67- 85.

3.3.68. MOTHU, Alain, La pensée en cornue, Paris-Milan, SÉHA-Archè, 2012, xii-409 p.

Le renouvellement des études érudites sur le cartésianisme passe par une meilleure appréhension des rapports de D. à l’alchimie. En témoigne entre autres ce beau volume, réunissant en les développant et en les articulant nombre des études particulières consacrées par l’A. à l’alchimie et à la pensée matérialiste au XVIIe siècle. On y retrouve non seulement des enjeux relatifs à la conception de l’âme matérielle à l’époque de D., mais aussi de précieuses indications sur le devenir de la pensée chimique à l’âge classique, tant dans la tradition paracelsienne que dans la continuité cartésienne dont l’importance n’est nullement négligée. L’ouvrage développe de subtiles mises au point sur les amalgames un peu trop rapidement effectués entre aspiration littéraire ou poétique et alchimie (la démonstration de l’absence de référence alchimique consistante chez Cyrano, p. 207-232 est à ce titre exemplaire) et offre des indications précises sur l’appréhension de la distillation dans les sciences naturelles et alchimiques. Cette somme, dont aucune page n’est de trop (sauf peut-être les p. 187-188 qui reprennent mot à mot les p. 94-95) est donc un ouvrage non seulement utile, mais même hautement recommandable, voire indispensable.

Xavier Kieft

3.3.69. NAWROCKI (Andrzej), « Naukowa obiektywizacja i doświadczenie winy : lektura listów Kartezjusza w świetle uwag Husserla [L’objectivation scientifique et l’expérience de culpabilité: lecture des lettres de Descartes à la lumière des remarques de Husserl] », Kwartalnik Filozoficzny 40, 2012, p. 59-71 [en polonais].

3.3.70. OLIVEIRA, Érico Andrade Marques, O Sujeito do Conhecimento. São Paulo, Martins Fontes, 2012, 80 p.

3.3.71. PAGANINI, Gianni, « Il piacere dell’amicizia. Hobbes, Gassendi e il circolo neo-epicureo dell’Accademia di Montmor », in ERLER, Michael & ROTHER, Wolfgang (éd.), Philosophie der Lust. Studien zum Hedonismus, Basel, Schwabe, 2012, 343 p., p. 239-257.

3.3.72. PAL, Carol, Republic of women : rethinking the republic of letters in the seventeeth century, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 316 p. (chap. I, sur Elisabeth de Bohème, et chap. II et III sur Anna Maria van Schurman)

3.3.73. PALMA, Vittorio de, « Die Welt und die Evidenz. Zu Husserls Erledigung des Cartesianismus », Husserl studies, 2012, 28, 3, p. 201-224.

3.3.74. PAVLOVITS, Tamàs, « Jean-Luc Marion lecteur de Pascal », in CAMILLERI, Sylvain, and TAKÁCS Ádam (éd.), Jean-Luc Marion. Cartésianisme, phénoménologie, théologie, Paris, Archives Karéline, 2012, 191 p. p. 33-53.

3.3.75. PEACOCKE, Christopher, « Descartes Defended », Aristotelian Society. Supplementary Volume, 86, p. 109-125.

3.3.76. PEACOCKE, Christopher, « First Person Illusions: Are They Descartes’, or Kant’s? », Nous-Supplement. Philosophical Perspectives, 26, 2012, p. 247-275.

3.3.77. PICKAVÉ, Martin & SHAPIRO, Lisa, Emotion and Cognitive Life in Medieval and Early Modern Philosophy, Oxford, Oxford University Press, 2012, 296 p.

3.3.78. PLAZENET, Laurence, « Le Port-Royal de Montherlant et ses sources », Revue d’histoire littéraire de la France, 2012, 112/1, p. 179-213.

3.3.79. POZZO, Riccardo, Adversus Ramistas. Kontroversen über die Natur der Logik am Ende der Renaissance, Basel, Shwabe, 2012, 259 p.

3.3.80. REED, Baron, « Knowledge, doubt, and circularity », Synthèse, 188, 2, p. 273-287.

3.3.81. ROBERTSON, Steven, « Some mixed strategies can evade Pascal’s wager : A reply to Monton », Analysis, 72, 2, p. 295-298.

3.3.82. ROMANO Claude, « La phénoménologie doit-elle demeurer cartésienne ? », Les études philosophiques, 2012, 100/1, p. 27-48 ; trad. anglaise « Must Phenomenology Remain Cartesian ? », Continental Philosophy Review, 45, 3, 2012, p. 425-445.

À la question avancée dans son titre, cet article n’apporte pas de réponse aussi tranchée qu’un ouvrage récent du même A. où figure cette déclaration radicale : « rien, absolument rien ne lie le destin de la phénoménologie à celui du cartésianisme » (Au cœur de la raison, la phénoménologie, Paris, 2010, p. 502). L’article constitue néanmoins la mise à l’épreuve d’une hypothèse énoncée par le même ouvrage comme suit : « Le tournant transcendantal se fonde tout entier sur la possibilité d’un doute universel. Si cette possibilité est ‘vide’, si la possibilité même de douter de quelque chose exclut la possibilité de douter de tout, il se pourrait que le cogito ne constituât ni un point de départ, ni a fortiori, le point de départ d’une philosophie authentiquement descriptive. Le destin de la phénoménologie ne se confondrait pas avec celui du cartésianisme » (op. cit., p. 543). Le constat dont il part est que le « cartésianisme de Husserl va […] de pair avec une reprise et une réélaboration du problème sceptique » (p. 28). L’inscription de Husserl dans le sillage de la réfutation du scepticisme par D. ne peut cependant, une fois reconnue, occulter la « limite de la stratégie cartésienne » (p. 30), qui est d’accepter et d’assumer la pertinence du problème sceptique. Ce problème est celui « de la possible inexistence du monde » (p. 31), validé par D. et repris par Husserl. Or, contre D. et Husserl, il est possible de prouver qu’il s’agit là d’un problème mal posé, dont on ne doit par conséquent faire un point de départ ni en philosophie en général, ni en phénoménologie en particulier. Le ressort de la démonstration est la dénonciation, chez Husserl, d’une « phénoménologie insuffisante de la distinction perception/illusion » (p. 42), insuffisance à laquelle l’A. oppose son propre « holisme de la perception » qui permet de montrer que l’« idée d’une illusion généralisée est phénoménologiquement inconsistante » (p. 46). Sans contester la pertinence de cette démonstration, on peut se demander si le cartésianisme de la phénoménologie se joue tout entier, comme l’A. le suggère, sur le terrain du problème sceptique et s’il suffit véritablement de désamorcer ce problème pour délier la phénoménologie du legs cartésien.

Claudia Serban

3.3.83. SALGUEIRO, Inês, « Certainty and Forms of Life », Certainty and Forms of Life », in GÁVEZ, Jesús & GAFFAL, Margit (ed), Doubtful Certainties : Language-Games, Forms of Life, Relativism, Heusenstamm bei Frankfurt: Ontos Verlag, 2012, p. 41-52.

3.3.84. SALLIOT, Natacha, « Une ‘mauvaise théologie reparée d’une rhétorique qui s’exhale en exclamations sans propos » ? La polémique confessionnelle et ses influences sur le discours théologique (XVIe-XVIIe siècles) », in GAY, Jean-Pascal, et STIKER-METRAL, Charles-Olivier (éd.), Les ‘métamorphoses’ de la théologie. Théologie, littérature, discours religieux au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 2012, 304 p., p. 131-146.

3.3.85. SANTIAGO DE CARVALHO, Mário, « ‘Amantes amentes’ O papel da memória na antropologia das paixões,segundo o Curso Jesuíta Conimbricense », Cauriensia. Revista anual de Ciencias Eclesiásticas, 2012, 7, p. 121-139.

3.3.86. SANTIAGO, Homero, « Entre servidão e liberdade », Cadernos Espinosanos, 2012, v. 26, p. 11-23.

3.3.87. SAUTKIN Alexandre & KOPYLOV, Vladimir (éd.), А. А. САУТКИН, А. В. КОПЫЛОВ (éds), Метафизика на переломе времен : сборник материалов регионального научно-практического семинара с международным участием, посвященного 450-летию Фрэнсиса Бэкона и 415-летию Рене Декарта, 21-22 февраля 2011 г [Métaphysique au tournant de l’époque: recueil de textes issus de séminaire régional avec une participation internationale à l’occasion de 450e anniversaire de Francis Bacon et le 415e anniversaire de René Descartes, 21-22 Février 2011], Мурманск, Мурманский государственный гуманитарный университет, 2011, 162 p. [en russe].

3.3.88. SGARBI, Marco (éd.), Translatio Studiorum. Ancient, Medieval and Modern Bearers of Intellectual History, Leiden, Brill, 2012, xiv-263 p.

3.3.89. SHAW, Devin Zane, « Cartesian Egalitarianism: From Poulain de la Barre to Rancière », PhaenEx. Journal of Existential and Phenomenological Theory and Culture, 7, 1, 2012, p. 101-129.

3.3.90. SHEIN, Noa, « Newton’s Anti-Cartesian Considerations Regarding Space », History of Philosophy Quarterly, 29, 1, 2012, 21-38.

3.3.91. SHOCKEY, R. Matthew, « Heidegger’s Descartes and Heidegger’s Cartesianism », European Journal of Philosophy, 20, 2, p. 285-311.

3.3.92. SIBONY-MALPERTU, Yaelle, Une liaison philosophique : du thérapeutique entre Descartes et la princesse Élisabeth de Bohême, Paris, Stock, 2012, 280 p.

3.3.93. STARZYŃSKI (Wojciech), « Fenomenologiczne określenie cielesnego podmiotu w świetle kartezjańskich analiz Michela Henry’ego i Jeana-Luca Mariona [La détermination phénoménologique du sujet corporel à la lumière des analyses cartésiens de Michel Henry et de Jean-Luc Marion] », Przegląd Filozoficzno-Literacki 2012, 3, p. 219-227 [en polonais].

3.3.94. STARZYNSKI, Wojciech, « La phénoménologie de Jean-Luc Marion est-elle cartésienne ? », in CAMILLERI, Sylvain, and TAKÁCS Ádam (éd.), Jean-Luc Marion. Cartésianisme, phénoménologie, théologie, Paris, Archives Karéline, 2012, 191 p., p. 17-32.

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3.3.96. VAN DAMME, Stéphane, « Méditations mathématiques. Retour sur une pratique morale des sciences à l’âge classique », Annales, 2012, 67/1, p. 135-152.

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3.3.98. VINOLO, Stéphane, Dieu n’a que faire de l’être: une introduction à l’oeuvre de Jean-Luc Marion, Meaux, Germina, 2012, 177 p. ; partie I, « Repenser l’apparaître : de l’objet cartésien au phénomène kantien », « Descartes et la réduction du monde à l’objet », « L’ordre et la mesure », « Kant : prolonger Descartes »

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3.3.100. WILSON, Jessica, « The regress Argument against Cartesian Skepticism », Analysis, 72, 4, p. 668-673.

ADDENDUM

2.1.1. HANUSZEWICZ, Stanisław, « Naturalistyczny sceptycyzm René Descartes’a [Le scepticisme naturaliste de René Descartes]», Studia Paradyskie 20, 2010, p. 11-16 [en polonais].

ISSN 1634-0639

Ce Bulletin est publié par le Centre d’études cartésiennes de l’Université Paris-Sorbonne, dirigé par Vincent Carraud ; secrétaire scientifique du Bulletin : Dan Arbib — ainsi que par le Centro Interdipartimentale di Studi su Descartes e il Seicento de l’Université du Salento, dirigé par Giulia Belgioioso ; secrétaire scientifique : Massimiliano Savini.

Réalisation du Bulletin : (1) Listes bibliographiques : Dan Arbib, Xavier Kieft ; (2) Liminaire : Siegrid Agostini ; (3) Recensions : Mmes Delphine Bellis, Annie Bitbol-Hespériès, Elodie Cassan, Laurence Devillairs, Ide Fouche-Lévi, Paola Nicolas, Julia Roger, Laure Verhaeghe ; MM. Igor Agostini, Jean-Pascal Anfray, Dan Arbib, Jean-Robert Armogathe, Philippe Boulier, Vincent Carraud, Guillaume Coqui, Michaël Devaux, Olivier Dubouclez, Pascal Dumont, Alberto Frigo, Denis Kambouchner, Xavier Kieft, Frédéric Lelong, Frédéric Manzini, Francesco Marrone, Steven Nadler, Gilles Olivo, Támas Pavlovits, Massimiliano Savini, – Correspondants : pour la Russie et l’Europe de l’est (langues slaves) : Wojciech Starzynski (Varsovie) ; pour l’Amérique latine hispanisante : Pablo Pavesi (Buenos Aires) ; pour le Brésil : Alexandre Guimaraes Tadeu de Soares (Uberlândia) ; pour le Japon : Masato Sato.

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