Auteur : Gauthier Tumpich

Bernard BOURGEOIS, Penser l’histoire du présent avec Hegel, Paris, Vrin, 2017, 144 p.

L’objectif de Bernard Bourgeois dans cet ouvrage est de penser notre présent de façon hégélienne, et de montrer ainsi l’actualité profonde de la philosophie hégélienne. Il a réuni pour ce faire six textes courts, relativement indépendants les uns des autres. Dans le premier texte, « Penser avec Hegel l’histoire présente », il tente de montrer que notre organisation politique actuelle est globalement conforme à ce qu’avait pensé Hegel : un « État socialement libéral et politiquement fort », dans lequel la liberté d’initiative est tempérée par l’exigence de solidarité. Les récentes attaques terroristes (en 2015 notamment) ont d’ailleurs réveillé chez le plus grand nombre le sentiment de l’État et de la nation, « au plus loin de tout nationalisme », ce qui s’accorde parfaitement avec les thèses hégéliennes. Dans le deuxième texte, « le temps du terrorisme », l’auteur développe une description hégélianisante du terrorisme islamiste contemporain, en partant des analyses du fanatisme islamique développées par Hegel dans ses cours sur la philosophie de l’histoire. Dans le troisième texte, Bernard Bourgeois prend pour objet les lectures par Axel Honneth de l’éthicité hégélienne, dont il se démarque, notamment parce que ces lectures auraient tendance à minorer le moment proprement politique de la philosophie hégélienne, au profit de son moment social. Dans le quatrième texte, l’auteur défend l’aspect logique de la philosophie hégélienne de l’État (concernant le « droit étatique interne »), qui fonde la nécessité de trois pouvoirs (prince, gouvernement, pouvoir législatif) sur les trois moments du concept que sont la singularité, la particularité et l’universalité. Dans le cinquième texte, Bernard Bourgeois soutient que la philosophie hégélienne de la fin de l’histoire (dont l’existence a été abordée dans le premier texte) est globalement meilleure que les philosophies de la fin de l’histoire de Fukuyama et de Kojève, notamment du point de vue des perspectives que la philosophie hégélienne laisse ouvertes pour l’existence humaine après cette fin de l’histoire. Enfin, dans le sixième et dernier texte, « Hegel : à venir », l’auteur déplore que le hégélianisme ne soit jamais véritablement devenu « un grand courant philosophique », Hegel étant le plus souvent refusé ou ignoré. Il existe en effet une sorte de consensus d’après lequel « le savoir absolu est inaccessible à la finitude humaine ». Contre cette idée, Bernard Bourgeois fait valoir que le savoir absolu est simplement la pensée de l’être en son sens total, et que cette idée de l’être « ne peut pas ne pas intervenir dans une philosophie ». L’auteur de la présente recension ne peut qu’approuver l’ambition générale de cet ouvrage, qui tente résolument de dépasser les démarches purement antiquaires en histoire de la philosophie. On regrettera simplement qu’il y ait une certaine disproportion entre la brièveté des textes ici rassemblés et l’ampleur immense de l’objectif poursuivi.

Gauthier TUMPICH (Académie de Versailles)

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Pour citer cet article : Gauthier TUMPICH, « Bernard BOURGEOIS, Penser l’histoire du présent avec Hegel, Paris, Vrin, 2017 », in Bulletin de littérature hégélienne XXVIII, Archives de Philosophie, tome 81/4, Octobre-décembre 2018, p. 821-856.

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